Notation des enseignants : Au mérite, c'est-à-dire à la tête du client ?24/11/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/11/une2260.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Notation des enseignants : Au mérite, c'est-à-dire à la tête du client ?

Le gouvernement concocte un projet de réforme de la notation des enseignants, qui reposerait entièrement sur l'appréciation du chef d'établissement.

Actuellement, la note se décompose en deux parties : les chefs d'établissement donnent une note sur 40 prenant en compte l'assiduité, la ponctualité, etc., tandis que les compétences pédagogiques sont évaluées sur 60 par des inspecteurs de la matière enseignée. La rapidité de la promotion, et l'augmentation de salaire qui en découle, dépendent donc prioritairement de la note pédagogique.

Ce système a certes des limites. Les inspecteurs ne jugent les enseignants que sur un seul cours, une fois tous les cinq-six ans, voire tous les dix ans. En outre, ils ne sont pas assez nombreux pour remplir entre-temps leur mission d'aide pédagogique de façon efficace et pour bien connaître le travail accompli par les enseignants qu'ils évaluent.

Partant de ce constat, le ministre de l'Éducation nationale Luc Chatel en arrive à la conclusion... qu'il faut supprimer le corps des inspecteurs et que la note, donc l'avancement, ne doit dépendre que du chef d'établissement, censé mieux connaître ses professeurs. C'est la porte ouverte au favoritisme et à la notation à la tête du client. En outre, quelles compétences un chef d'établissement aura-il pour juger qu'un enseignant transmet correctement des connaissances aux élèves sur des matières qu'il ne maîtrise pas ou ne connaît pas du tout ? Dans le meilleur des cas, lorsque lui-même était professeur avant de devenir principal ou proviseur, son expérience se limitait à l'enseignement d'une matière. Mais maintenant, de plus en plus de chefs d'établissements ne sont même pas passés par cette voie et de toute façon, ce que le gouvernement attend d'eux est d'être de « bons gestionnaires », c'est-à-dire d'être capables de gérer la pénurie de moyens et de personnel en faisant en sorte qu'il n'y ait pas de vagues.

Cette nouvelle notation s'accompagne d'une modification de la grille d'évaluation qui fera qu'un enseignant bien noté mettra vingt-six ans au lieu de vingt pour atteindre le dernier échelon.

L'argument suprême avancé par Luc Chatel est de dire qu'il n'y a pas de raison de faire différemment du privé, où les chefs notent leurs employés. Mais, outre toutes les réserves que l'on peut faire sur les notations dans le privé, qu'attend-on d'un enseignant ? De figurer au livre des records pour avoir corrigé un maximum de copies ou pour le bon taux de réussite aux examens, sachant que celui-ci ne sera pas le même dans les lycées chics de centre-ville que dans ceux de ZEP ?

Une fois de plus, à défaut d'investir dans l'éducation, le gouvernement utilise de façon sournoise la vieille démagogie consistant à opposer les salariés du privé à ceux de la fonction publique qui bénéficieraient d'un prétendu privilège.

Pour dénoncer entre autres ce projet de la note « au mérite », les syndicats enseignants appellent à une journée de grève le jeudi 15 décembre.

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