Niches fiscales : Coups de rabot et grosses zones d'ombre14/09/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/09/une2250.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Niches fiscales : Coups de rabot et grosses zones d'ombre

Le gouvernement n'en finit plus, et cela s'est encore accru avec son plan d'austérité, de donner des coups de rabot aux niches fiscales. Bien sûr, il présente cela comme une mesure d'équité supprimant certains avantages fiscaux à des personnes présentées comme privilégiées. Mais, pour avoir beaucoup servi, ce refrain n'abuse plus grand monde.

Ainsi, entre autres mesures de « justice fiscale » envisagées, il a été question de s'en prendre à l'abattement d'impôt de 10 % auquel ont droit les retraités. Un projet que le gouvernement a préféré ajourner. À après les élections ?

Mais alors que l'Inspection des finances inventorie 470 niches fiscales (plus 68 « niches sociales »), et que la grande presse décortique le rapport du Comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales... on parle beaucoup moins de la majeure partie des allégements et exonérations d'impôts accordés par l'État, car elle reste, et cela très officiellement, dans l'ombre.

Un quart des recettes nettes de l'État (65 milliards d'euros), selon l'Inspection des finances, disparaît du fait des fameuses niches. Mais au moins 80 autres milliards (environ 35 % des recettes fiscales de l'État) manquent à l'appel par le biais de ce que l'on appelle le déclassement : une procédure qui consiste à faire disparaître ces mesures, et les sommes qu'elle représentent, de l'inventaire fiscal soumis chaque année à l'Assemblée nationale. Le comble, en ce domaine, est celui du bouclier fiscal : jamais « classé », il n'a même pas eu besoin d'être déclassé.

Parmi ces niches déclassées, il ne faut pas s'étonner de trouver sept des douze postes de manque à gagner fiscal les plus coûteux pour l'État. En tête, le régime des sociétés mères et filiales a coûté 23,30 milliards d'euros à l'État en 2010 (et il a dû atteindre de tels sommets que le fisc le déclare « non chiffrable » cette année !) : 42 000 entreprises en bénéficient. Suit (pour 18,4 milliards) le régime d'intégration fiscale des résultats des sociétés (80 000 entreprises). Il y a aussi le crédit d'impôt recherche dont profitent 12 800 entreprises pour un total de 2,1 milliards : une combine qui leur fait économiser en impôt PLUS que ce qu'elles ont « investi » en programme de recherche !

Les bénéficiaires de ces niches non considérées comme telles par le fisc sont les très grandes entreprises, ce qui leur permet, selon le rapporteur même du budget à l'Assemblée, de payer un impôt inférieur de 21 points en moyenne à celui qu'acquittent les PME. Premier au palmarès du cumul du manque à gagner fiscal « déclassé », on trouve l'impôt sur les sociétés, avec 67 milliards d'euros.

Le total des niches, officielles ou « déclassées », atteint au moins 145 milliards. Et même 170 milliards, selon la CGT, avec les dégrèvements de cotisations, le 1,2 milliard d'euros d'exonérations des heures supplémentaires, etc., dont le patronat profite grâce à l'État.

Tout cet argent, dont le fisc se défait essentiellement au profit des capitalistes, représente plus que le déficit annuel du budget. La dette de l'État, c'est donc la bourgeoisie, et d'abord la grande, qui la creuse.

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