ArcelorMittal -- Florange (Moselle) : Le prétexte, usé jusqu'à la corde, de la crise14/09/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/09/une2250.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

ArcelorMittal -- Florange (Moselle) : Le prétexte, usé jusqu'à la corde, de la crise

500 travailleurs se sont rassemblés à Florange vendredi 9 septembre pour protester contre les menaces sur la dernière grande usine sidérurgique du groupe ArcelorMittal en Lorraine. Beaucoup d'entre eux travaillaient auparavant dans d'autres installations sidérurgiques aujourd'hui fermées, comme l'aciérie de Gandrange.

L'annonce par ArcelorMittal de la mise à l'arrêt au moins jusqu'au début 2012 de son deuxième haut-fourneau (le premier étant déjà arrêté depuis juin dernier) a suscité beaucoup d'inquiétude. D'autant que cela fait suite à l'arrêt en juin de l'autre haut-fourneau et à la mise au chômage partiel de la division Emballage.

ArcelorMittal veut-il fermer à terme ses usines de Lorraine ? En tout cas la direction, depuis trois ans, éteint et rallume les hauts-fourneaux pour faire face aux pics de commandes, avec autant de légèreté qu'on allume sa gazinière. Or un haut-fourneau monte à plus de 1 000 degrés et chaque extinction ou rallumage dégrade l'ensemble des installations, en particulier le briquetage réfractaire. Comme en plus aucun investissement n'est réalisé, tout laisse à penser qu'ArcelorMittal veut user les installations jusqu'à la corde... pour les fermer ensuite sous prétexte de leur état.

Mais il est possible aussi qu'ArcelorMittal veuille tout simplement faire pression pour que le robinet des aides publiques s'ouvre encore plus grand. En effet un projet est sur les rails pour faire du haut-fourneau qui vient d'être arrêté une installation pilote où le gaz carbonique (CO2), au lieu de partir dans l'atmosphère, serait piégé puis stocké dans le sous-sol. La réalisation de ce projet -- baptisé Ulcos -- coûterait plus de 620 millions d'euros, que l'Union européenne devrait apporter, la décision devant être prise au début 2012. Dans ce cas, le gouvernement apporterait 150 millions au pot et bien sûr la Région suivrait. Alors, ArcelorMittal veut-il faire monter les enchères ?

En tout cas, tous les hommes politiques de la Région -- gauche et droite confondues -- se mobilisent pour ce projet Ulcos qui, en prime, a une saveur écologiste, même s'il est bien discutable qu'enfouir des milliers de tonnes de CO2 dans le sous-sol soit sans danger pour l'avenir. Et tant pis si l'argent ainsi donné à ArcelorMittal manquera ensuite pour construire des écoles, des hôpitaux, ou faire que les trains arrivent à l'heure !

Une fois de plus, c'est au nom de l'emploi que les pouvoirs publics s'apprêtent à donner, avec la bénédiction de tous, des centaines de millions à un groupe qui a fait 1,8 milliard d'euros de bénéfices... rien qu'au premier semestre !

En attendant, ce sont les travailleurs qui trinquent. 400 intérimaires sont renvoyés. Par ailleurs le chômage partiel -- financé par les pouvoirs publics -- devrait toucher plus de 600 travailleurs. Sans compter les centaines de travailleurs de la sous-traitance qui n'auront plus de travail.

Voilà quarante ans que patrons et gouvernements nous parlent de la crise de la sidérurgie. Mais on n'a pas cessé de produire de l'acier : bon an mal an, la production d'acier se situe toujours autour de 20 millions de tonnes depuis quarante ans -- même si l'an dernier la production était plus près de 15 millions que de 20. Mais cela se fait avec 100 000 travailleurs de moins !

Il faut arrêter cette hémorragie. Il n'est jamais trop tard. Il n'y a aucune raison d'accepter que le numéro un mondial de l'acier impose des heures supplémentaires sur les sites de Fos et de Dunkerque, tandis qu'il réduit au chômage -- partiel aujourd'hui et peut-être total demain -- les travailleurs de Florange et d'autres sites en Europe.

Maintenir tous les sites de production en se partageant le travail entre tous sans baisser les salaires -- et en premier lieu garder tous les intérimaires et les embaucher en CDI --, interdire toute suppression d'emplois à ce groupe immensément riche, gavé d'argent public... c'est ce qu'il faudrait imposer à ArcelorMittal, qui en a largement les moyens.

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