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Italie : Deux plans d'austérité en un mois Une attaque brutale contre les travailleurs
« Notre coeur saigne. Notre gouvernement pouvait se vanter de n'avoir pas mis les mains dans les poches des Italiens ». C'est par ces mots que Berlusconi a commenté le projet de plan d'austérité, d'un montant de 45 milliards d'euros, présenté par son gouvernement le 13 août.
Il faut bien sûr comprendre, lorsque Berlusconi dit « les Italiens », qu'il parle des bourgeois, des hommes de sa classe, à qui en effet son gouvernement n'a jamais demandé de contribuer à restaurer les finances du pays. Et ils n'y contribueront pas beaucoup plus après ce plan, au contraire des autres « Italiens », ceux de la classe ouvrière et des classes populaires, qui ne feront que payer de plus belle.
Ce plan présenté en urgence, en plein milieu du mois d'août, fait suite à un premier plan de 45 milliards d'euros d'économies adopté à la hussarde en juillet. Sous la pression de la spéculation internationale, le gouvernement Berlusconi et en particulier son ministre des finances Giulio Tremonti ont estimé qu'il fallait, très vite, montrer qu'ils feront ce qu'il faut pour redresser les finances du pays et payer rubis sur l'ongle les intérêts de la dette.
Le plan prétend toucher les hauts revenus par une « taxe de solidarité » de 5 % sur les revenus salariés dépassant 90 000 euros par an, et de 10 % sur ceux dépassant 150 000 euros. Il parle également d'une taxe de 20 % sur les « rentes financières », qui devrait rapporter deux milliards d'euros. Mais il prévoit surtout une série de mesures contre les travailleurs du public et du privé.
Ainsi, l'augmentation prévue de l'âge de départ en retraite sera accélérée, en particulier pour les femmes du secteur privé, pour qui celui-ci atteindra 65 ans en 2027. Le versement de l'indemnité de départ des travailleurs de la fonction publique (la « liquidation ») sera retardé de deux ans. S'ajoutant au blocage des salaires déjà en vigueur, leur treizième mois sera supprimé s'ils sont salariés d'institutions qui « ne respectent pas les objectifs », une formulation qui semble ouvrir la voie à tous les arbitraires. La dotation des différents ministères sera réduite de six milliards dès 2012, ce qui laisse prévoir le gel de toutes les embauches, même sous contrat précaire. Les dotations des collectivités locales seront réduites d'autant, ce qui laisse prévoir un gel équivalent des embauches et des coupes drastiques dans les budgets de toute une série de services publics, allant des transports à la santé, déjà largement visés dans le premier plan d'austérité.
Le gouvernement n'oublie pas de faire plaisir au patronat au passage. Le projet de décret prévoit en effet de donner une valeur légale aux accords locaux ou d'entreprise conclus en dérogation aux accords nationaux. En pratique, cela sanctifie les accords imposés par la direction de Fiat dans ses usines de Naples et de Turin, contre lesquels des actions juridiques étaient en cours de la part des syndicats. Enfin, il prévoit une mesure bien symbolique : les jours fériés « non concordataires », c'est-à-dire les fêtes laïques, ne seront pas fêtés en semaine, mais reportés au dimanche le plus proche. Autant dire que seuls demeureront les jours fériés correspondant à une fête catholique, et que les autres jours fériés seront supprimés. Cela concerne l'anniversaire de la fondation de la République italienne, le 2 juin, celui de la chute du fascisme, le 25 avril, et enfin... le 1er°mai ! Passons sur le prétexte, qui est évidemment de renforcer la « compétitivité » de l'économie italienne, aux dépens des travailleurs bien sûr, en délivrant au passage un message politique qui devrait plaire à toute l'opinion réactionnaire.
Il reste maintenant à faire approuver ce projet par le Parlement. Cela devrait être fait début septembre, mais cela n'est pas sans susciter des polémiques au sein même de la majorité gouvernementale, et en particulier de la Ligue du Nord dont l'électorat montre de plus en plus son mécontentement pour le soutien du parti à Berlusconi. En revanche, comme pour le premier plan d'austérité en juillet, la collaboration d'une opposition que l'on n'ose même plus appeler de gauche permettra peut-être une approbation rapide. De même les organisations syndicales, et en particulier la CGIL, ne laissent prévoir rien d'autre que des protestations de principe. Reste à savoir ce que sera la réaction des travailleurs à ce plan qui ne leur annonce que des privations, la misère pour beaucoup, et certainement l'aggravation d'une crise aux conséquences déjà dramatiques.