Les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) ont débuté à Madrid, organisées par l'Église du 18 au 21 août avec toute l'aide logistique et financière du gouvernement, de la région et de la ville, pour promouvoir, sous l'égide du pape Benoît XVI, les idées les plus réactionnaires qui sont les siennes et même admonester le gouvernement socialiste.

Lors de sa dernière visite, en novembre 2010, le pape avait fustigé « l'anticléricalisme agressif » que vivait le pays, comparable à celle de la seconde République (1931-1936). Aujourd'hui, la lutte contre la laïcité « agressive » reste son leitmotiv et des lois adoptées par les gouvernements socialistes, et surtout celui de Zapatero, comme le mariage homosexuel ou l'IVG, sont violemment mises en cause.

En tout cas, la prétendue laïcité « agressive » a fait de la venue du pape un « événement d'intérêt spécial », ce qui implique qu'il sera reçu avec tous les honneurs et fastes par la famille royale et le gouvernement, et aussi que les deniers publics prendront en charge tout ce qui concerne la sécurité, le transport et la santé. Sans parler de dispositions financières qui font que dans le coût des JMJ, estimé à 50 millions d'euros, la moitié sera financée par l'État (région et municipalités comprises). Ainsi les entreprises de l'Ibex 35 (équivalent espagnol du CAC 40) qui financent à titre privé l'événement d'intérêt spécial (BBVA, Banco de Santander, Telefonica, etc.) se voient gratifiées d'un intérêt bien palpable celui-là : des bénéfices fiscaux jusqu'à 80 % ! Et ce n'est pas tout. Quelque 700 établissements publics (collèges, lycées, complexes sportifs) sont mis à disposition des pèlerins pour un prix loin de couvrir tous les frais. Et pour s'en occuper, des fonctionnaires ont été réquisitionnés et leurs vacances annulées !

Autre apport public : 600 000 abonnements de transports ont été réservés à prix de pèlerin : 80 % moins cher que l'abonnement touriste équivalent, soit 20 millions d'euros de cadeau. Et pour qu'en ce mois d'août tout ce beau monde puisse circuler, Métro a fait appel à 600 « extras » payés 100 euros la journée ( 60 000 euros). Et pour les Madrilènes qui devront prendre le métro, puisque, événement spécial oblige, tout le centre de la ville est fermé à la circulation pendant une semaine, ils pourront prendre le billet simple de métro qui vient d'augmenter de 50 % !

Il serait trop long d'énumérer l'implication financière de l'État. Terminons simplement par la mise à disposition du palais des congrès, loué par le gouvernement pour que s'y installe la presse, et même de la mairie de Madrid, transformée en sacristie de luxe pour les évêques !

La droite réactionnaire, à la tête de la région et de Madrid, adhère sans réserve à ces journées en autorisant l'affichage religieux sur la façade d'établissements publics. Le gouvernement socialiste se tait et participe. Cependant, plus d'une centaine d'organisations essentiellement laïques protestent contre la place accordée à l'événement et l'utilisation de l'argent public, alors que depuis des mois gouvernement et collectivités locales économisent sur les services publics, aux dépens de la population laborieuse. Les autorités de Madrid et de l'Église ont donc essayé d'interdire toute manifestation anti-JMJ. Le stand des « indignés », installé à la Puerta del Sol, a été délogé par la police, par exemple. Des manifestations s'en sont suivies pendant plusieurs jours, montrant que la mobilisation des indignés n'est pas finie malgré la période de vacances, et finalement une manifestation passant par le centre de Madrid devait avoir lieu le 17 août, veille de l'arrivée du pape. On ne met pas si facilement terme à l'indignation !