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- Lutte ouvrière n°2243
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Dans le monde
10 millions de personnes touchées par la famine
Selon l'ONU et diverses ONG, la Corne de l'Afrique connaît la pire sécheresse depuis soixante ans. Des millions de personnes sont menacées par la famine qui en résulte à Djibouti, en Éthiopie, en Somalie et au Kenya. En cause, une saison inhabituellement sèche, aux conséquences aggravées par la flambée des prix des produits alimentaires qui ont parfois été multipliés par cinq.
Un communiqué conjoint de la FAO, du PAM et d'Oxam souligne que « les populations nécessitant une aide d'urgence sont passées de 6,3 millions d'individus début 2011 à 10 millions aujourd'hui ». Et cette tragédie ne peut que s'aggraver du fait que la saison sèche commence à peine, et qu'il n'y aura pas de pluies avant au moins trois mois, alors que les greniers sont déjà vides.
À cette catastrophe s'ajoutent les dégâts causés par les conflits locaux, notamment en Somalie où une guerre de clans dure depuis 1991. Des dizaines de milliers de personnes fuient la Somalie pour le nord du Kenya où sont installés les plus grands camps de réfugiés du monde. D'autres tentent de fuir vers le Yémen, avec tous les risques que comporte la traversée. Ainsi, au début du mois, 197 personnes sont mortes au large des côtes yéménites dans le naufrage du navire qui les transportait clandestinement.
De nombreux représentants d'ONG font état de scènes insoutenables et de « tragédie humaine aux proportions inimaginables ». Une porte-parole du Haut-Commissariat pour les Réfugiés témoigne ainsi à propos des camps en Éthiopie : « Le plus tragique pour nous, c'est de constater que des enfants arrivent si affaiblis qu'en dépit de nos soins (...) ils meurent dans les vingt-quatre heures. »
Et quoi qu'ils en disent, cette situation est pourtant loin d'émouvoir les dirigeants des grands pays. Les représentants de l'ONU dénoncent ainsi le fait que leurs agences n'ont reçu que la moitié du 1,6 milliard de dollars promis par les États membres pour les programmes d'assistance dans la région. À Djibouti, par exemple, les 39 millions de dollars demandés pour 2011 n'ont été couverts qu'à hauteur de 30 %. Et les quelques millions d'euros supplémentaires promis récemment apparaissent bien dérisoires face aux besoins. En fait, le Kenya n'intéresse que pour ses ressources touristiques et ses safaris, Djibouti que pour sa position stratégique et les implantations militaires qu'offre ce minuscule territoire.
La colonisation a laissé derrière elle une Afrique exsangue, des peuples divisés par des frontières arbitraires, une agriculture rudimentaire, des cultures vivrières qui reculent sans cesse devant les cultures industrielles destinées au marché mondial. Et aujourd'hui, institutions financières, banques et fonds de pension spéculent sur les cours des denrées alimentaires, le blé et le riz notamment, quand ils n'accaparent pas des dizaines de milliers d'hectares de terres cultivables pour leur seul profit. On en mesure les conséquences par la famine qui frappe aujourd'hui des millions d'hommes, de femmes et d'enfants.
Une tragédie qui juge et condamne définitivement ce système économique qui laisse mourir des millions de gens, car ceux-ci n'intéressent pas les marchés financiers et les gouvernements qui les protègent.