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Italie : L'austérité au programme de Berlusconi... et des candidats à sa succession
C'est une vaste manoeuvre de réduction de dépenses publiques que le gouvernement de Berlusconi est en train de mettre au point en Italie. On a d'abord parlé de 47 milliards d'euros sur quatre ans, puis en fait de 68 milliards. Il s'agit de répondre aux injonctions de la Commission européenne de réduire le déficit et la dette de l'État, mais surtout aux pressions des banques qui sont en train de faire de l'Italie, après la Grèce et l'Irlande, le Portugal et l'Espagne, une des cibles de la spéculation.
Les recettes mises au point par le ministre des Finances Giulio Tremonti n'ont rien d'original. Ces réductions de dépenses devraient toucher particulièrement le système de santé, les collectivités locales, les fonctionnaires dont les salaires seraient bloqués, les retraités dont les pensions pourraient diminuer tandis que l'âge de la retraite serait relevé. Cela annonce en fait quatre ans d'austérité renforcée, s'ajoutant à de précédentes mesures d'austérité tout aussi sévères.
Le plan Tremonti fait apparaître des calculs cousus de fil blanc : les réductions de dépenses ne seraient que de quelques milliards les deux premières années, pour atteindre plus de 20 milliards les deux années suivantes. Les prochaines élections législatives devant normalement avoir lieu en 2013, le gouvernement Berlusconi s'apprête ainsi à laisser un cadeau empoisonné à son successeur.
La gauche italienne, et en premier lieu le Parti démocrate, après les succès remportés lors des récentes élections locales, espère revenir au pouvoir, peut-être même avant 2013. Mais le moins qu'on puisse dire est qu'elle ne promet pas vraiment de changement politique. Son principal reproche à Berlusconi est de s'occuper trop de ses affaires privées et pas assez des problèmes de l'Italie et de son économie. Ses leaders entendent par là que, par exemple, le gouvernement Berlusconi n'aide pas assez les patrons italiens à affronter la concurrence, et ils assurent qu'en la matière un gouvernement du Parti démocrate fera bien mieux. Le sort des travailleurs, leur emploi, leur pouvoir d'achat ne sont évoqués que pour dire qu'ils ne s'amélioreront que s'il y a croissance de l'économie et de la productivité.
Le Parti démocrate sera peut-être amené à faire la preuve de sa responsabilité plus tôt que prévu. Devant l'emballement de la spéculation, la pression se fait forte pour accélérer l'adoption du plan d'austérité par le Parlement. Le président de la République Giorgio Napolitano, lui-même membre du Parti démocrate, incite ce parti à approuver rapidement et sans trop se faire prier le plan du gouvernement Berlusconi.
Les travailleurs sont donc avertis de ce qui les attend. Quant à un éventuel futur gouvernement de gauche, il leur dira non seulement qu'il faudra combler le trou laissé dans les finances par le gouvernement Berlusconi, mais qu'il faudra faire des efforts pour restaurer la « compétitivité » de l'économie italienne.
Les syndicats sont sur la même ligne : le principal syndicat italien, la CGIL, vient d'annoncer son accord avec les deux syndicats CISL et UIL et avec leur politique propatronale. Après avoir critiqué pendant des mois, et avec raison, la disponibilité de la CISL et de l'UIL à signer des accords d'entreprise dérogeant aux conventions collectives nationales, notamment chez Fiat, la secrétaire de la CGIL Susanna Camusso vient de signer avec eux une déclaration commune en faveur de tels accords, ne parlant que des impératifs de productivité des entreprises, au nom desquels les patrons devraient pouvoir faire ce qu'ils veulent. Les travailleurs, eux, devraient s'y soumettre.
À l'annonce du plan d'austérité, Susanna Camusso n'a d'ailleurs émis que quelques protestations platoniques. Alors que la situation des travailleurs s'aggrave déjà de façon dramatique et que l'usure du gouvernement Berlusconi apparaît de plus en plus évidente, les dirigeants de la gauche, aidés par les dirigeants syndicaux, se chargent déjà de faire comprendre qu'ils feront tout pour satisfaire le patronat et les « marchés ». Mais le dernier mot reste au monde du travail, et à sa capacité de riposte.