Côte d'Ivoire : La population reste soumise à l'insécurité et au racket15/06/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/06/une2237.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Côte d'Ivoire : La population reste soumise à l'insécurité et au racket

Depuis la fin officielle de la guerre civile opposant Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara pour la présidence de la Côte d'Ivoire, ce dernier multiplie les beaux discours sur la paix et la réconciliation nationale. Mais la population reste exposée à la loi des bandes armées, plus particulièrement des FRCI (Forces républicaines de Côte d'Ivoire, favorables à Ouattara). À ce sujet, nous extrayons plusieurs témoignages du dernier numéro du mensuel Le pouvoir aux travailleurs, édité par nos camarades de l'Union Africaine des Travailleurs Communistes Internationalistes. Ils montrent que les populations pauvres continuent d'être rackettées et assassinées. Mais, visiblement, les nouveaux dirigeants ne se sentent pas concernés, trop occupés qu'ils sont à se partager les postes donnant accès à la mangeoire et aux caisses de l'État.

Dans certains quartiers d'Abidjan, de même que dans les villages du département d'Alépé et Anyama, les exactions continuent. Les habitants d'Ahoué sont quotidiennement menacés par les FRCI sous prétexte de rechercher des armes cachées. Ils pillent les maisons des villageois. D'autres sont battus à sang. (...) À N'zeugui, les populations ont abandonné leur village pour se réfugier dans la brousse et dans des campements. Depuis plus d'un mois, des éléments des FRCI ont élu domicile dans ce village. Ils pillent les maisons, frappent et enlèvent des jeunes qui refusent de coopérer avec eux.(...)

Un chauffeur de wôrô wôrô (taxi collectif) à Abobo Derrière-Rail raconte : « Les FRCI font le barrage matin et soir. Quand ils nous arrêtent, ils ne contrôlent pas nos papiers mais demandent de l'argent. Souvent je donne 300 ou 500 francs CFA. »Un autre chauffeur de car faisant Abidjan-Agboville est arrêté à un barrage. Son apprenti voulait présenter les papiers, mais le chauffeur énervé lui a dit : « Ce n'est pas la peine, donne-leur 200 F, on va partir ! » Ces FRCI prennent aussi l'argent des passagers. Ils sont organisés en petites bandes éparpillées à travers la ville, qui contrôlent chacune une zone. Chaque bande rackette de la façon la plus brutale les petits vendeurs et commerçants qui s'y trouvent. »(...)

Dans la zone industrielle de Yopougon (Abidjan) le travail reprend progressivement, mais le problème de l'insécurité n'est toujours pas résolu. Un travailleur raconte : « La semaine dernière trois de nos collègues ont subi des brimades des éléments des FRCI. Le premier venait au travail lorsqu'il a été interpellé au carrefour Ivograin. Ils lui ont demandé de présenter sa pièce d'identité, ce qu'il a fait. Mais l'un des éléments des FRCI, estimant qu'il avait présenté sa pièce de loin, a carrément tiré deux coups de feu entre ses jambes. Notre collègue est sain et sauf, mais traumatisé par la scène qu'il vient de vivre.

« Le deuxième, au même endroit, a lui aussi été interpellé pour les mêmes raisons. Lorsqu'il a présenté sa pièce, l'élément la lui a arrachée, l'a mise dans la bouche et l'a mâchée. Ensuite, il l'a accusé d'être un milicien et lui a écrasé l'orteil avec la crosse de son fusil.

« Le troisième a présenté sa pièce. Il s'avère qu'il est Guéré (ethnie de l'ouest de la Côte d'Ivoire où il y a eu de nombreux massacres). L'élément des FRCI l'a automatiquement traité de milicien. Il lui a ordonné de se coucher et a enlevé le cran de sécurité de son fusil, malgré le fait que le collègue répétait qu'il était un travailleur depuis sept ans sur la zone industrielle et qu'il n'avait rien à voir avec toute cette histoire. Un autre élément des FRCI est intervenu en sa faveur, et c'est à ce dernier qu'il doit son salut.

« Ces exemples ne sont pas des cas isolés. Il y a deux jours, deux personnes ont été tuées non loin du marché Micao, devant l'entreprise SIP. (...) Trois semaines avant, un ouvrier de Ghandour, accusé d'être un milicien, a été tué. Sur indication, les FRCI sont allés le chercher jusque sur son lieu de travail (...). Son cadavre a été retrouvé près du lac.

Un jour de la même semaine, je partais au travail lorsque je suis tombé sur des éléments des FRCI qui étaient en train de brûler des corps. C'était horrible. »

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