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- Lutte ouvrière n°2230
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Leur société
Déclarations d'intérêts des ministres : Rien à déclarer... ou tout à cacher ?
Le gouvernement a publié sur son site Internet, comme la loi l'impose, les déclarations d'intérêts de l'ensemble de ses ministres. Il s'agit de prouver qu'ils ne profitent pas de leur fonction pour faire fructifier leurs propres intérêts. Après les polémiques provoquées par l'affaire Woerth-Bettencourt, puis les relations tunisiennes de Michèle Alliot-Marie en mars dernier, cela s'impose. Seulement voilà, à trop vouloir prouver, ces déclarations attirent surtout l'attention sur ce qu'on n'y trouve pas.
En effet dix-huit ministres sur trente et un ne déclarent rien du tout. D'autres passeraient pour de bons pères de famille, comme Juppé qui ne déclare qu'une assurance-vie. Quant à ceux qui ont des actions, comme Fillon (EDF et Crédit Agricole), Pécresse (Accor, Air Liquide, Carrefour, Valeo), Chatel, Mariani ou Ollier, on n'en connaît pas le montant. Au passage, on peut noter que deux (oui, que deux !) d'entre eux sont assujettis à l'ISF : Christine Lagarde, ministre de l'Économie, et Thierry Mariani, secrétaire d'État aux Transports. En guise de transparence, on n'y voit pas plus clair.
Mais surtout, en réalité, les liens des milieux politiques avec les milieux d'affaires sont si nombreux qu'il serait trompeur de vouloir les réduire simplement aux conflits d'intérêts.
Nombre de politiciens ont été eux-mêmes dans les affaires, et le seront encore après avoir exercé leurs fonctions ministérielles. Christine Lagarde a été la dirigeante d'un des principaux cabinets d'avocats américains, Baker et McKenzie. Longuet a fondé sa société de conseil, qui avait été missionnée par GDF-Suez en cours de privatisation, alors qu'il était sénateur. Luc Chatel a été DRH chez L'Oréal, Éric Besson délégué général de la CGE-Vivendi, Nora Berra médecin pour les laboratoires Sanofi-Pasteur, etc.
Les relations entre bourgeoisie et gouvernement passent aussi par les liens familiaux. Ainsi le père de Valérie Pécresse est président du conseil de surveillance de Bolloré Télécom et son mari directeur général du groupe de minéraux industriels Imerys.
Ces réalités ne sont pas nouvelles et concernent les gouvernements et les politiciens de gauche comme ceux de droite. Et même quand ils n'appartiennent pas personnellement à la bourgeoisie, les politiciens qui la servent sont confortablement récompensés pour leurs services, et leur passage dans les ministères est l'occasion de renforcer des liens et de remplir des carnets d'adresses qui leur seront utiles par la suite.
La déclaration - que tout le monde sait bidon - des ministres sur Internet est sans révélations. La vérité, on la saura quand les travailleurs décideront de mettre leur nez dans les comptes des entreprises, des banques, et dans les ministères.