Le programme du PS : Rien à en attendre pour le monde du travail06/04/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/04/une-2227.gif.445x577_q85_box-0%2C12%2C167%2C228_crop_detail.png

Editorial

Le programme du PS : Rien à en attendre pour le monde du travail

« Circulez, il n'y a rien à voir » : ainsi semble se résumer le projet du Parti Socialiste, que sa secrétaire Martine Aubry présente mardi 5 avril. Pourtant, il faut croire qu'il n'a pas été facile à élaborer. Depuis des mois et des années, si on demandait aux dirigeants socialistes ce qu'ils feraient si l'un d'entre eux prenait la place de Sarkozy, ils répondaient : « Attendez, nous préparons notre projet ».

Eh bien, en matière de changement, c'est le programme minimum, encore plus timide que celui de Jospin entre 1997 et 2002 ! En guise de lutte contre le chômage, 300 000 « emplois-jeunes » seraient créés en deux ans, donc des emplois au rabais et à durée déterminée. Au moment où le gouvernement de Sarkozy réduit l'emploi dans tout le secteur public et notamment supprime des milliers de postes dans l'Éducation nationale, c'est donc toute la réponse du PS ?

Quant à revenir sur l'augmentation de l'âge de la retraite de 60 à 62 ans, imposée par Sarkozy malgré les manifestations de cet automne, il n'y a aucun engagement dans ce sens.

À part cela, il y aurait dans le programme « une grande réforme fiscale », une TVA « écomodulable » et un plafonnement des revenus des dirigeants des entreprises d'État. L'échelle des salaires y serait limitée de 1 à 20, sans qu'il soit question pour autant d'augmenter ceux des travailleurs du bas de l'échelle. Pour l'augmentation du pouvoir d'achat, on repassera !

Enfin, en matière d'énergie le PS promettrait de sortir du « tout-nucléaire », ce qui en soi ne veut rien dire mais qui fera peut-être plaisir à l'électorat écologiste.

Et voilà, c'est tout. C'est à croire qu'il n'y a pas eu, il y a trois ans, une crise financière qui continue d'avoir des conséquences dramatiques pour la population. À croire qu'il n'y a pas eu un déluge de fermetures d'entreprises, de licenciements, l'accroissement du chômage, de la précarité, de la pauvreté, les services publics à l'abandon, de l'enseignement aux hôpitaux et aux transports. C'est à croire qu'il n'y a pas eu pendant tout ce temps l'accroissement scandaleux des inégalités - et pas seulement du fait des rémunérations des dirigeants des entreprises publiques. À croire qu'il n'y a pas eu les bénéfices scandaleux des banques, le redoublement de la spéculation sur la dette des États, l'argent public dilapidé pour aider le grand patronat à faire des profits, les énormes bénéfices des entreprises du CAC 40 qui s'affichent en même temps que les plans de licenciements.

Alors est-ce que tout cela, les dirigeants du PS qui ont pris tant de temps à élaborer leur programme ne l'ont pas vu ? Bien sûr que si, mais la vérité, c'est qu'ils ne veulent pas toucher aux privilèges et au pouvoir des capitalistes, ni au droit des grands patrons de licencier. Pas question de toucher à la toute-puissance de ces gens qui peuvent décider en cinq minutes de fermer une grande entreprise et d'enfoncer toute une région dans la misère, ou bien de spéculer contre un État et de le mettre en faillite, quitte à plonger toute la société dans la crise.

L'important de ce programme serait, paraît-il, de pouvoir « rassembler » pour vaincre Sarkozy. Oui, en quatre ans de pouvoir, Sarkozy a su s'attirer la haine des travailleurs, des chômeurs, de tous ceux qui ont été la cible de ses attaques. Mais le programme du Parti Socialiste nous confirme que, si son objectif est bien de remplacer l'homme à la tête de l'État, ce n'est pas de changer de politique.

On l'avait déjà bien vu quand il était au gouvernement, mais on le voit aussi dans d'autres pays d'Europe comme l'Espagne ou la Grèce. Conseillés par Dominique Strauss-Kahn en tant que directeur du FMI, des gouvernements socialistes y appliquent les mêmes politiques d'austérité que les gouvernements de droite. En France, les dirigeants du PS feront de même s'ils reviennent au gouvernement en 2012. Autant dire que le « changement » qu'ils nous promettent n'en sera pas un.

Pourtant, si les travailleurs, les chômeurs, l'ensemble de la population laborieuse, veulent cesser de payer les conséquences d'une crise provoquée par les banques, les capitalistes, le grand patronat, il leur faudra s'en prendre à leur pouvoir. De toute évidence, il ne faudra pas compter pour cela sur la volonté des dirigeants du PS, ni donc sur une prétendue « alternance » aux prochaines élections, si elle a lieu. Les travailleurs devront le faire par la lutte. Et ils en ont la force.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 4 avril

Partager