L'UMP a finalement tenu mardi 5 avril son débat tant annoncé sur la laïcité. Il y avait des ministres, des caméras de télévision et l'assurance de faire l'actualité du moment sur le sujet favori de la droite, l'islam et les soi-disant menaces qu'il ferait peser sur le pays.

Claude Guéant, le ministre de l'Intérieur, avait préparé le terrain en ajoutant sa louche hebdomadaire de stupidité à la soupe xénophobe de l'UMP et du gouvernement. Il a ainsi affirmé cette fois-ci qu'il y aurait de « cinq à six millions de musulmans » en France et que « cet accroissement du nombre de fidèles et un certain nombre de comportements posent problème ».

Il serait inutile de noter que, pour un ministre de l'Intérieur et des Cultes, il est bien mal renseigné et que ses chiffres sont assez approximatifs. Inutile également de relever que, quel que soit le nombre de supposés « musulmans », il y en a aussi peu qui sont pratiquants réguliers que chez les supposés « catholiques » ou autres. Inutile encore d'affirmer que, de plus, la liberté de culte existe et que le fait de prier dans la rue, faute de mieux, n'est pas plus outrageant, ni moins, que d'y porter des croix en procession. Inutile enfin de conclure que tout cela n'a pas l'importance que la droite fait semblant de lui accorder, surtout pas au regard des problèmes réels et autrement pressants qui se posent à la population.

Parce que c'est justement pour ne pas parler de ces problèmes réels que Sarkozy, Guéant, Copé et consorts multiplient ce genre de déclarations et organisent ces prétendus débats.

Les patrons licencient ? Sarkozy attaque les Roms. Les prix augmentent et les salaires sont bloqués ? Guéant s'en prend aux mosquées. Les services publics sont mis à mal ? Copé attaque les femmes voilées. Les bombes de l'armée françaises tombent de l'Afghanistan à la Côte d'Ivoire en passant par la Libye ? L'UMP organise un débat sur l'islam.

Depuis l'été dernier la seule période durant laquelle Sarkozy et consorts ne sont pas parvenus à saturer l'air ambiant de propagande xénophobe a été celle durant laquelle des millions de travailleurs ont manifesté pour défendre les retraites. Mais, le reste du temps, la droite, relayée par le Front National, a imposé sa musique.

Car, manifestement, Sarkozy a choisi de préparer l'élection présidentielle de 2012 sur le même terrain que Le Pen. Ce pari politique inquiète même une partie de ses partisans lorsqu'ils constatent qu'à ce jeu-là c'est apparemment le Front National qui gagne. Jusqu'aux instances religieuses qui refusent de participer sur ces bases-là à la triste comédie de Sarkozy. Et après Villepin, Borloo et même Fillon, pourtant Premier ministre, semblent faire la fine bouche, illustrant la crainte de certains notables de droite de perdre une partie de leur électorat au centre sans en gagner pour autant un sur leur droite.

Ces petites querelles internes à la droite n'ont certes d'importance que pour elle et peu importe après tout les postes qu'elle y gagnera ou y perdra. Mais le plus grave est que toute cette agitation peu reluisante autour d'idées réactionnaires, et lourdes de dangers pour les travailleurs, contribue à les banaliser et à faire oublier les vrais problèmes. C'est d'ailleurs au fond ce que cherchent tous ces politiciens de la droite à l'extrême droite.