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Leur société
Le gaz de schiste : L'odeur du profit
Plusieurs milliers de personnes ont participé samedi 26 février au premier rassemblement national contre l'exploration et l'exploitation du gaz de schiste organisé à Villeneuve-de-Berg en Ardèche. Il y avait entre 10 000 personnes selon la préfecture, et 20 000, selon les organisateurs.
Dans le Sud-Ouest, c'est autour de trois communes que des permis d'exploration de gaz de schiste ont été octroyés en catimini à Total et GDF Suez, associés à des entreprises américaines. C'était en mars dernier, et le ministre de l'époque était Borloo. Mais dès que cela s'est su, la réaction a été partout la même : pas question !
Le gaz de schiste, dit « non conventionnel », dont le vrai nom est gaz d'argilites, est un gaz naturel enfermé dans les microfissures des couches de schistes. La technique de forage, dite par fracturation hydraulique, est utilisée aux États-Unis depuis dix ans. Elle aurait permis aux USA de devenir en 2009 le premier producteur de gaz, devant la Russie. Dans un puits foré à plus de 1 000 ou 2 000 mètres de profondeur est injecté à très haute pression un cocktail d'eau, de sable et de produits chimiques (liste non fournie au nom du secret industriel), pour fracturer la roche. Le sable introduit dans les fractures garde celles-ci ouvertes et libère le gaz, qui remonte alors à la surface.
Les conséquences sont désastreuses pour l'environnement et les riverains. Le documentaire de l'américain Josh Fox sur le sujet, Gasland, est éloquent : terres dévastées, eaux empoisonnées, personnes malades. On y voit un habitant qui, en plaçant un briquet devant le robinet ouvert de son évier, déclenche une grande flamme, ou des familles qui se font livrer chaque mois de l'eau potable, car celle du robinet est impropre à la consommation. Ce reportage a été diffusé lundi 28 février sur France 2.
Qu'à cela ne tienne, d'après un document interne de Total cité par le quotidien Les Échos, les gisements du sud de la France renfermeraient 2 380 milliards de mètres cubes de gaz, soit 50 années de consommation nationale. L'estimation est certes théorique mais, vu la hausse des prix du pétrole, cette exploitation des gaz de schiste, nécessitant de gros investissements, risque de devenir une source de profits supplémentaire. Et cela d'autant plus que, toujours d'après Total, « les conditions fiscales françaises sont parmi les plus intéressantes au monde, avec des remises sur les impôts de 35 % du total, (...) cette source de gaz bon marché avec une fiscalité attractive sera donc très compétitive ».
Devant l'inquiétude des populations concernées, la ministre de l'Écologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, se veut rassurante et promet que cela se fera « à la française » : « pas question » de suivre l'exemple américain, où « des techniques dangereuses pour l'environnement » ont été utilisées. Il faudrait donc faire confiance à la ministre, à ses experts, aux chercheurs de Total ou à ceux de GDF-Suez. Pas moins !
Le respect de l'environnement et des hommes n'étant pas la qualité première des trusts de l'énergie, comme l'ont montré la marée noire dans le golfe du Mexique, la catastrophe de l'Érika ou l'explosion d'AZF, ceux qui se mobilisent ont bien raison : aucune confiance ni dans les capitalistes ni dans leur gouvernement !