Vers le gazole à 1,50 euro ? Marché noir sur l'or noir10/02/20112011Journal/medias/journalnumero/images/2011/02/une-2219.gif.445x577_q85_box-0%2C14%2C164%2C226_crop_detail.png

Leur société

Vers le gazole à 1,50 euro ? Marché noir sur l'or noir

En ce début février, le litre de gazole à la pompe vaut en moyenne 1,29 euro, celui de SP 95 1,45 euro, soit des prix approchant le maximum atteint en 2008. L'augmentation est de 10 % depuis le début de l'année et les économistes distingués annoncent que cela va continuer.

Pour toute explication les compagnies pétrolières mettent en avant, successivement ou parallèlement, la demande chinoise, la reprise aux États-Unis, les menaces sur le canal et l'oléoduc de Suez suite aux événements d'Égypte et les réactions du « marché » à ces différents phénomènes. La demande en produits pétroliers risquant de croître, l'approvisionnement menaçant d'être plus délicat, les prix étant susceptibles d'augmenter, des investisseurs parient sur cette augmentation et ce pari devient lui-même une cause de l'augmentation des prix. Pendant que le pétrole réel circule tout à fait normalement dans les soutes des tankers ou les tuyaux des oléoducs, le pétrole virtuel, sous forme d'options d'achat dans les ordinateurs des traders, change de propriétaire à la vitesse de la lumière et son prix augmente à chaque transaction. Au final le consommateur individuel, celui qui n'a pas les moyens d'acheter des cargaisons entières sur le marché mondial, paye son carburant au prix du marché spéculatif.

Il importe peu que, par exemple, la menace de fermeture du canal de Suez soit aujourd'hui complètement hypothétique. Il est tout à fait secondaire même qu'une fermeture du canal ne puisse avoir qu'un effet quasi négligeable sur les prix du pétrole car le détour ne serait pas si grand pour le peu de pétroliers qui empruntent en fait cette route. La seule chose qui compte c'est qu'un certain nombre de financiers font semblant d'y croire, pour entamer un mouvement à la hausse qui, ensuite, se nourrit de lui-même.

Il y a tellement de capitaux inemployés, résultant des bénéfices tirés de l'exploitation des travailleurs, errant sur les marchés à la recherche de placements rentables rapidement, que tout ce qui se vend et s'achète est susceptible de servir de base à une spéculation. Les financiers spéculent sur le blé et le riz, au risque d'affamer des populations entières, sur les oeuvres d'art dont les prix atteignent des sommets invraisemblables, sur les métaux, ferreux ou non, en vrac ou au détail, les monnaies, les dettes, le football et la moutarde sur pied. Ces opérations ne créent rien en elles-mêmes, elles ne servent qu'à répartir la valeur produite par le travail entre les différents groupes de capitalistes, les plus puissants se taillant évidemment la part du lion sur l'exploitation de l'ensemble des travailleurs de la planète.

La spéculation, qui n'est qu'une partie des opérations financières, n'est pas le fait de méchants traders ou de financiers sans conscience, mais des capitalistes. C'est le fonctionnement normal de l'économie capitaliste. C'est pourquoi prétendre mettre un frein à la spéculation sans vouloir changer ce système est aussi stupide, ou aussi malhonnête, que de vouloir convaincre Dracula des bienfaits du régime végétarien.

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