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Allemagne : Derrière le « miracle de l'emploi »... une attaque contre les travailleurs
Depuis des mois, en Allemagne, le gouvernement et les médias se félicitent du fait que, malgré la crise, le chômage soit en baisse. Les statistiques officielles font en effet état de 2,932 millions de chômeurs en novembre, soit le niveau le plus bas enregistré depuis 1992.
Alors que, dans bien des pays d'Europe, le nombre de sans-emploi a explosé depuis deux ans, cela est en effet notable. Mais en réalité, si l'on compte les chômeurs de plus de 58 ans, qui ne sont plus comptabilisés dans les statistiques, ceux en formation ou en stage de reconversion (où l'on peut, par exemple, simplement apprendre à rédiger une lettre de motivation) ou employés dans les petits boulots à 1 euro de l'heure imposés à ceux qui sont en fin de droits, l'Agence pour l'emploi allemande avoue elle-même que 5,5 millions de personnes sont aujourd'hui à la recherche d'un emploi, d'un véritable emploi.
Parallèlement le nombre de demi-chômeurs a explosé. Si on fait le total des travailleurs qui n'ont qu'un CDD, une mission d'intérim ou un emploi à temps partiel, comme les 4,3 millions de salariés ayant un mini-job à 400 euros par mois, on arrive à près d'un tiers de l'ensemble des salariés du pays. Cette proportion ne s'élevait qu'à un quart il y a encore dix ans.
Alors c'est vrai, le nombre d'emplois a augmenté, mais beaucoup ne permettent pas de vivre. C'est vrai même si on a un CDI. Car dans bien des professions les salaires sont très bas. Ainsi, dans le secteur de la sécurité, il va passer, pour les Länder de l'est du pays, à 6,53 euros de l'heure en 2011. Et si, dans la sidérurgie ou dans quelques grandes entreprises comme Bosch, le patronat a accordé récemment de minimes augmentations de salaire, qui sont loin de permettre un rattrapage de ce qui a été perdu depuis des années, dans bien des secteurs c'est l'inverse qui se produit.
Le contexte général de précarité conduit à exercer une pression à la baisse sur l'ensemble des salaires. Par exemple la Deutsche Post vient de décider que les nouveaux embauchés le seront désormais au salaire minimum de 9,8 euros de l'heure à l'Ouest (et 9 euros à l'Est), alors qu'à l'heure actuelle les facteurs et autres employés gagnent entre 11 et 20 euros de l'heure.
Un tel salaire minimum avait été instauré dans le secteur postal en 2008. Alors qu'il n'existe pas de smic en Allemagne, sauf pour quelques secteurs très limités, il s'agissait théoriquement d'empêcher le dumping social de la part des concurrents privés de la Poste, elle-même privatisée depuis 1996. Au lieu de cela, c'est aujourd'hui la Poste qui l'utilise pour tirer vers le bas le salaire de tous les travailleurs.
Derrière la façade scintillante des statistiques du chômage en baisse, il y a en fait une attaque massive du patronat, qui a utilisé les deux années écoulées depuis le début de la crise pour supprimer des emplois en CDI et pour baisser les salaires de millions de travailleurs.
De plus, les politiciens de la CDU annoncent déjà que les salariés doivent se préparer à un allongement du temps de travail, et parlent d'une semaine de travail légale à 45 heures ! Eh bien, s'il y a quelque chose à préparer c'est plutôt la lutte contre la dégradation continue des conditions de travail et des salaires, contre le chômage, pour la répartition du travail entre tous sans diminution de salaire !