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Martinique : Ghislaine Joachim-Arnaud traduite devant le tribunal - un procès colonial
En Martinique, Ghislaine Joachim-Arnaud, secrétaire générale de la CGTM et représentante de Combat Ouvrier, a été assignée devant le tribunal correctionnel le 29 septembre par le procureur de la République. La convocation lui étant parvenue hors délais, ses avocats vont demander le renvoi de l'affaire.
Suite à une plainte d'un certain Jean-François Hayot, de l'association « Respect DOM », notre camarade avait été entendue le 16 septembre 2009 pour avoir utilisé dans ses propos à l'antenne de télévision ATV le refrain repris par des milliers de manifestants tout au long des mouvements de masse de février et mars 2009 : « Matinik se ta nou, Matinik se pa ta yo ! An ban bétché volé, Nou ké foute yo déco », ce qu'on peut traduire par : « La Martinique est à nous, la Martinique n'est pas à eux, une bande de profiteurs nous volent, que l'on va foutre dehors ».
En traduisant Ghislaine Joachim-Arnaud devant le tribunal, la justice choisit de s'en prendre en même temps à des milliers de travailleurs, jeunes, femmes, chômeurs, qui lors de la grève et des manifestations de 2009 ont crié leur exaspération, leur colère et leur volonté d'en finir avec les agissements des exploiteurs et oppresseurs de tous bords !
Ceux qui manifestaient ces jours-là sont ceux qui souffrent des bas salaires, du chômage, des emplois précaires, des prix exorbitants pratiqués sur les produits courants par les maîtres du grand commerce et ceux de l'import-export. Ce sont ceux-là qui, durant les mois de février et mars 2009, ont crié leur colère contre ces exploiteurs et voleurs qui les exploitent dans les plantations et qui les dépouillent ensuite au coin des grandes surfaces !
Que les gros exploiteurs dits « békés », qui sont les maîtres de l'économie de la Martinique (depuis des siècles !) se soient trouvés les cibles des chants, slogans et quolibets des foules de manifestants n'a rien d'étonnant pour qui connaît (ou a vécu) l'histoire de la Martinique. Tous les grands mouvements sociaux de ce pays ont toujours trouvé face à face des gros békés, propriétaires et exploiteurs, et des travailleurs salariés exploités qui luttaient pour améliorer leur condition.
Aucune justice ne peut changer l'histoire passée, ni la réalité des faits sociaux ! La caractéristique de « béké » est étroitement liée à la nature sociale des activités des susnommés. Il n'y a ni race, ni pays, ni peuple béké. Les békés sont et ont toujours été synonymes d'exploiteurs, de gros propriétaires et de descendants des planteurs esclavagistes des siècles passés !
Si Ghislaine Joachim-Arnaud passe en procès, ce sont des milliers de travailleurs, des dizaines de milliers de manifestants qui ont chanté les mêmes paroles qui lui sont reprochées qui seront ainsi poursuivis en justice. Et le jour du procès, ils devront être présents pour lancer ces mots-là, publiquement, à la face de tous ceux qui désirent une confirmation de ce qu'ils pensent et ressentent !