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- Lutte ouvrière n°2199
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Grande-Bretagne - Congrès des syndicats : Le TUC volontaire pour gérer la crise
Face à l'austérité annoncée par le gouvernement Cameron et, en particulier, aux 700 000 emplois publics qu'elle menace, le congrès annuel de la confédération syndicale TUC, tenu dans la semaine du 13 septembre à Manchester, était censé être un « congrès de lutte ». Il était temps, sachant qu'en trois ans de crise, les directions syndicales n'ont pratiquement jamais donné aux travailleurs l'occasion de faire entendre leur voix.
Mais la montagne n'a accouché que d'une souris. Sans doute a-t-on entendu des discours fleuves sur la nécessité de « mouvements coordonnés », voire du recours à la « désobéissance civile ». Mais de cette rhétorique il n'est rien resté, sinon ce que la direction du TUC avait prévu dès avant le congrès : un vague « programme d'action », sans aucun objectif précis. Et encore, ne s'agit-il que d'exercer une « pression » respectueuse sur les députés avec, peut-être, la perspective d'une manifestation nationale pour... mars 2011 !
Pour les leaders syndicaux, il était urgent de ne pas se presser. Tant pis pour les travailleurs qui ont à faire face dès aujourd'hui aux attaques du gouvernement ! Ainsi, au moment même où se déroulait le congrès, 26 000 travailleurs des services municipaux de Birmingham recevaient un avis recommandé leur enjoignant de signer de nouveaux contrats de travail, comportant une baisse de salaire et une aggravation de leurs conditions, sous peine de licenciement, au nom des besoins de l'austérité !
En revanche les leaders syndicaux se félicitent de ce que « le patronat et les syndicats aient travaillé de concert pour empêcher les suppressions d'emplois ». Sans doute les millions de travailleurs à temps partiels, dont le nombre, déjà considérable en 2007, a explosé dans la crise, ne voient-ils pas les choses du même oeil. Sans parler du personnel au sol de British Airways pour qui ce partenariat patronat-syndicat vient de se traduire par la signature d'un accord supprimant 500 emplois ! Et de ceux de la poste où le syndicat de la Communication coopère avec la direction à la fermeture de dizaines de centres et à la suppression de milliers d'emplois.
Or, c'est justement ce genre de « partenariat » avec le patronat et le pouvoir que recherchent les appareils syndicaux. Comme le dit la résolution de la direction du TUC adoptée par le congrès, ils « ne sont pas opposés à des changements négociés ni à de véritables mesures d'économie ». D'ailleurs le TUC a un « projet économique » pour combler le déficit dû au sauvetage de la finance, d'une façon « plus progressive » que Cameron, mais sans toucher aux profits du capital, et donc forcément sur le dos de la classe ouvrière.
Jusqu'à présent, les directions syndicales ont pu se servir à la fois du chantage à l'emploi du patronat et de la législation antigrève pour contenir le mécontentement des travailleurs, ne le laissant s'exprimer que dans le cadre de mouvements très isolés et contrôlés. Mais il n'est pas dit qu'elles y parviennent toujours.
Pour appuyer leur politique de « lobbying » des députés, elles ont elles-mêmes évoqué lors de ce congrès les leçons des grèves des années 1980 et de la lutte contre la poll tax (impôt municipal indépendant des revenus) sous Thatcher. Ce que les leaders syndicaux se sont bien gardé de rappeler, c'est que le facteur essentiel dans la défaite successive des grandes grèves des années 1980 - dans la Santé, la sidérurgie, les mines, les docks, la marine, l'imprimerie, etc. - fut l'isolement corporatiste dans lequel ils les ont laissées.
Au contraire, le facteur décisif dans l'abandon de la poll tax fut la mobilisation sans précédent des travailleurs dans la rue, partout dans le pays, qui fit craindre au patronat que le trop-plein de mécontentement finisse par affecter ses profits. Et s'il y a des leçons de la récession des années 1980 qui pourraient servir aujourd'hui à la classe ouvrière britannique, ce sont bien celles-là.