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Antilles : La population empoisonnée avec la complicité de l'État
Deux rapports confirment que les mises en garde concernant les dangers du chlordécone pour la population des Antilles ont été ignorées par le ministère de l'Agriculture pendant près de vingt ans, sous la pression des grands planteurs de banane.
Interdit aux États-Unis dès 1976, classé comme cancérigène possible en 1979, le chlordécone est un pesticide qui fut utilisé à grande échelle dans les bananeraies de Guadeloupe et Martinique. Il ne fut interdit en France qu'en 1990, et seulement trois années plus tard aux Antilles.
Entre-temps, les grands planteurs avaient pu écouler leurs stocks. Mais le chlordécone avait empoisonné des milliers d'ouvriers travaillant dans les plantations, ainsi que des milliers d'hectares de terres, de nombreux cours d'eau et même la mer. Et cela de façon durable, car cette molécule qui se dégrade difficilement se fixe pour de nombreuses années dans les sols.
Le rapport de l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) met en évidence « de véritables anomalies dans le cadre d'une approche de prévention » et « dans la gestion du dossier du chlordécone par le ministère de l'Agriculture ». Celui de l'Agence nationale de sécurité sanitaire conclut que, « face à la défense de l'industrie bananière française », l'impact de l'utilisation de ce produit sur l'environnement et la santé « a été secondaire dans les préoccupations des autorités politiques ».
On s'en doutait depuis longtemps, mais ces rapports ont le mérite de le confirmer : la population antillaise a été empoisonnée par les capitalistes de la banane, avec la complicité de l'État. Et ce n'est sûrement pas un cas isolé.