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Guadeloupe-Martinique : La population a été sciemment empoisonnée
Aux Antilles, une étude scientifique vient de remettre d'actualité une affaire dont les conséquences pourraient être pires que celles de l'amiante ou du sang contaminé : il s'agit de l'affaire du chlordécone, un pesticide puissant mais très nocif pour la santé, utilisé massivement dans les plantations de banane.
L'étude, menée entre 2004 et 2007 auprès de plusieurs centaines d'hommes, vient en effet de confirmer que « l'exposition au chlordécone augmente de manière significative le risque de cancer de la prostate », qui représente la moitié des cancers dépistés en Guadeloupe et en Martinique.
Les dangers que faisait peser ce produit sur la population et pour l'environnement étaient connus depuis longtemps. Dès 1976, les États-Unis l'avaient retiré du marché. En France, bien qu'un rapport de l'INRA daté de 1977 ait signalé les dangers que pouvaient représenter les fortes concentrations de ce produit dans le sud de la Guadeloupe, l'État, sensible aux intérêts des groupements de planteurs, a continué à autoriser son utilisation jusqu'en 1990 ; il a même accordé des dérogations aux planteurs de Guadeloupe et Martinique jusqu'en 1993.
La pollution que cela a engendré est une véritable bombe à retardement car le chlordécone a une durée de vie de plusieurs décennies et personne ne sait comment le neutraliser. Quel cadeau pour les générations à venir ! De plus, la contamination ne se limite pas aux sols ; les sources, les rivières et le littoral ont également été touchés par le biais des pluies et des ruissellements. Rien qu'en Martinique, 22 500 hectares de terres agricoles seraient gravement pollués. Et c'est toute la chaîne alimentaire qui est concernée : on retrouve des traces de chlordécone dans les ignames et les patates douces, des légumes qui entrent dans l'alimentation de base de la population. On en retrouve également dans certains poissons et crustacés.
Pendant des années, les pouvoirs publics ont fait la sourde oreille, refusant même d'instruire les nombreuses plaintes qui ont été déposées. Pourtant la responsabilité de l'État dans ce scandale sanitaire est évidente, celle des planteurs également. Reste à savoir comment les victimes seront indemnisées (si elles le sont), et dans combien de termps ?