Pologne : Blanc benêt et benêt blanc07/07/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/07/une-2188.gif.445x577_q85_box-0%2C14%2C163%2C226_crop_detail.png

Dans le monde

Pologne : Blanc benêt et benêt blanc

C'est l'homme politique de droite Bronislaw Komorowski qui vient de remporter les élections présidentielles en Pologne, écartant de la présidence l'autre candidat de droite, Iaroslaw Kaczyncski, frère jumeau du président décédé lors de l'accident de son avion présidentiel à Smolensk en Russie le 10 avril.

Beaucoup de monde a voulu voir dans cette élection le succès d'une droite pro-européenne au détriment d'une droite populiste et nationaliste. Et on peut constater que l'électorat de Komorowski est plus situé dans les villes, plus situé à l'ouest de la Pologne, région plus développée économiquement, tandis que l'électorat de Kaczynski est, lui, plus situé dans les campagnes et les petites villes, et plus à l'est de la Pologne. Mais cela reflète le style de campagne des candidats et les illusions de leurs électeurs et des médias.

Car si le président Kaczynski décédé ainsi que son frère ont pu passer pour plus attachés à « protéger » la population par rapport aux desiderata de l'Union européenne, cela ne repose que sur leurs rodomontades et bouderies auprès des institutions européennes, pendant que les entreprises d'Europe de l'Ouest continuaient sur le terrain à s'implanter sans entraves.

Quant au nouveau président, Komorowski, c'est un habitué du paysage politique de la droite polonaise depuis 1989, un politicien qui faisait partie de l'entourage de Walesa. Une anecdote est révélatrice du personnage : s'il porte le prénom de Bronislaw, a-t-il fait savoir, c'est en l'honneur de son oncle, fusillé par les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale, et qui le portait, lui, en l'honneur de son propre oncle, fusillé par les bolcheviks à Saint-Pétersbourg... Mais, à part cela, il est pour la poursuite du programme de privatisation des entreprises publiques, entamé par le précédent gouvernement, et pour la hausse de l'âge du départ en retraite, que ses prédécesseurs avaient aussi décidée de mettre en place.

Des deux, les travailleurs n'avaient donc rien à attendre. Mais il leur était sans doute difficile de trouver un candidat qui les représente car, au premier tour, sous l'étiquette de gauche, le candidat qui a eu le plus de voix, Napieralski, dont les 14 % ont été présentés comme une remontée surprenante, représentait de fait un héritage politique bien loin des travailleurs. La SLD (Alliance Démocratique de la Gauche), son parti, est en effet l'héritière politique du POUP, le parti qui dirigea la dictature antiouvrière liée à l'URSS et prétendument communiste avant 1989. Une fois renversé, ce courant politique s'est recyclé en vantant les vertus du capitalisme et, lorsqu'il s'est retrouvé de nouveau au pouvoir, entre 1995 et 2005, il a reculé devant toutes les offensives des traditionalistes catholiques, entre autres au sujet des droits des femmes, et en particulier sur le droit à l'avortement.

À l'heure actuelle, la Pologne est un peu moins naufragée par la crise économique actuelle que d'autres pays d'Europe de l'Est. Il n'empêche que le relatif développement économique du pays depuis une vingtaine d'années s'est fait en démantelant toutes les protections sociales, tous les services publics, en particulier les services de santé, et que ce sont les ouvriers, les retraités, les chômeurs qui sont les laissés-pour-compte de cette évolution. Et il est sûr que ce n'est pas Komorowski qui inversera ce processus.

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