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Procès du Probo Koala à Amsterdam : Empoisonner ne coûte pas cher
Le 1er juin s'est ouvert à Amsterdam le procès du Probo Koala, ce cargo qui en août 2006 avait déchargé à Abidjan, en Côte d'Ivoire, des milliers de tonnes de déchets toxiques. Abandonnés dans des décharges à ciel ouvert, ces déchets avaient tué dix-sept personnes et en avaient empoisonné des milliers d'autres.
L'organisation écologiste Greenpeace, qui a retrouvé et fait témoigner les camionneurs qui ont transporté les déchets à Abidjan, a tenté d'introduire dans ce procès le volet ivoirien de cette sinistre affaire. En vain, car des accords amiables sont intervenus en octobre 2009 : l'État ivoirien a touché 152 millions d'euros de dédommagements. Les 31 000 plaignants ivoiriens ont reçu 33 millions, environ 1 000 euros chacun en moyenne, en échange d'une renonciation à toute action.
Les juges hollandais ne s'intéresseront donc qu'à ce qui s'est passé à Amsterdam. Même si ce n'est pas le pire, cela en apprend déjà beaucoup sur les méfaits des sociétés pétrolières.
Le Probo Koala, cargo grec immatriculé au Panama, avait été affrété par Trafigura. Cette multinationale, fondée par deux affairistes français, intervient dans le pétrole et les métaux non ferreux et a déclaré en 2008 un chiffre d'affaires de 60 milliards d'euros.
À son arrivée à Amsterdam, le 2 juillet 2006, le capitaine ukrainien engagea une société néerlandaise pour traiter les résidus de pétrole que contenaient ses soutes, selon lui. Mais au pompage cette société comprit vite qu'il s'agissait en fait de déchets industriels particulièrement toxiques, et elle réclama pour les traiter non pas 23 euros mais 900 euros du mètre cube. Comme il n'était pas question pour Trafigura de payer ce prix, les déchets réintégrèrent le cargo qui repartit aussitôt, pour reparaître le mois suivant sur le port d'Abidjan.
Mais la société hollandaise de traitement des déchets, le port d'Amsterdam et la ville, tous au courant de ce que transportait le Probo Koala, n'avaient pas légalement le droit de le laisser repartir et étaient très contents de faire ce cadeau empoisonné à la population d'Abidjan. Ils sont aujourd'hui sur le banc des accusés, en compagnie de Trafigura et du capitaine du navire.
La société pétrolière et la compagnie de navigation vont avoir à payer pour avoir enfreint les règlements internationaux en matière de déchets toxiques. Du moins on peut l'espérer. Mais sous prétexte qu'ils ont déjà payé... des broutilles, ils ne risquent plus aucune amende pour les dégâts mortels qu'ils ont causés et continuent à causer en Côte d'Ivoire, où il resterait encore 3 000 tonnes de ces déchets.