Steelcase - Marleheim (Bas-Rhin) : Coup de colère contre la fermeture21/04/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/04/une2177.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Steelcase - Marleheim (Bas-Rhin) : Coup de colère contre la fermeture

Depuis mercredi 14 avril, la production est complètement arrêtée à l'usine Steelcase de Marlenheim près de Strasbourg, une usine où existent un atelier Bois qui fabrique des bureaux et un atelier Métallurgie qui fabrique des armoires de bureau. Lorsque les travailleurs ont appris, par les délégués qui avaient quitté la réunion de Comité d'entreprise, que la direction avait annoncé la fermeture de l'usine pour la fin de l'année, ils ont tous quitté leur poste et se sont retrouvés sur le parking de l'usine à 11 heures du matin. Pas question pour eux de reprendre le travail alors qu'on les jette dehors.

Déjà lundi matin, ils avaient découvert en arrivant au travail que la direction avait embauché des vigiles, ce qui ne s'était jamais vu sur ce site depuis qu'il existe, début des années 1990. Cette présence insolite en a déjà ému plus d'un. L'annonce de la fermeture définitive de l'usine s'est traduite par des mouvements de colère, avec quelques machines à café mises à mal et quelques vitres cassées. Et ensuite, entre ceux qui étaient sous le choc avec les larmes aux yeux, et la rage de certains, c'est la colère qui a pris le dessus. À l'arrivée de l'équipe d'après-midi, une brève AG s'est tenue, qui a voté la non-reprise du travail.

La direction, au cours de la réunion du matin, avait évoqué de possibles reclassements dans l'usine de Wisches à 30 km de là, ou bien à Rosenheim en Allemagne. Mais, pour ces travailleurs qui ont déjà subi un plan de licenciements de plus de cent salariés qui avait touché les trois usines alsaciennes il y a tout juste un an, avec la fermeture d'une petite unité de 80 personnes à Rosheim, les promesses de reclassement pour environ 90 personnes ne sont pas du tout crédibles. Ils en ont marre d'être trimballés d'une usine à l'autre (la plupart viennent de l'usine de Koenigshoffen à Strasbourg, qui a fermé il y a cinq ans), avec des trajets toujours plus longs, des journées de travail sans fin. Au 1er mars, la direction avait supprimé vingt minutes de pause payées et imposé l'allongement de la journée de travail d'autant. Dans les semaines qui ont suivi, les responsables des ateliers exerçaient un flicage systématique sur les travailleurs, allant jusqu'à voir dans les douches s'ils n'avaient pas quitté le travail trop tôt.

Le premier réflexe, passés les premiers moments d'abattement, c'était : « On va se battre .» La proposition d'exiger 300 000 euros d'indemnisation pour pouvoir tenir longtemps mise en avant par certains, a été reprise. Le calcul a été vite fait : 60 millions pour les travailleurs, ce serait tout à fait légitime quand on sait que la direction de Steelcase a distribué 130 millions de dollars aux actionnaires en 2009. Et parler d'emplois au moment où toutes les entreprises de la région licencient, font du chômage partiel ou sont sur le point de fermer comme Delphi, c'est une chimère.

Une première entrevue avec la direction et les représentants syndicaux vendredi s'est terminée par la promesse que les trois jours non travaillés, de mercredi à vendredi, seraient payés. Des travailleurs disent à juste titre qu'ils ne sont pas en grève, puisque c'est la direction qui les met dehors ! Ce lundi 19, l'ensemble des travailleurs a d'abord renvoyé derrière ses grilles le directeur de l'usine, qui prétendait séparer les grévistes de ceux qui voulaient travailler, en présence d'un huissier. Il a pu entendre à l'occasion tout le bien que les ouvriers pensaient de lui. Puis ils ont à nouveau accompagné la délégation élue par l'assemblée au siège à Schiltigheim. Comme la direction chipotait pour recevoir des salariés non délégués, une soixantaine de travailleurs ont forcé le passage en bousculant un peu les vigiles. Les CRS en place devant le siège ont laissé faire.

De cette entrevue, il est ressorti une proposition de prime de 22 000 euros en plus des indemnités légales : cela a fait rire la soixantaine de travailleurs présents dans la salle. Une entrevue doit avoir lieu avec le sous-préfet le mercredi 21 avril, ce qui sera l'occasion de se rendre tous à Strasbourg, avec le soutien de travailleurs d'autres entreprises, notamment d'ouvriers de General Motors. La plupart sont conscients que c'est une bagarre de longue haleine qui commence et qu'il va leur falloir beaucoup de détermination pour obtenir ne serait-ce qu'une partie de ce qu'ils veulent.

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