Bouclier fiscal : Mini-fronde au sein de la majorité08/04/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/04/une2175.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Bouclier fiscal : Mini-fronde au sein de la majorité

Un nouveau sujet de polémique est apparu au sein de la majorité : faut-il maintenir ou non le bouclier fiscal, ce dispositif qui permet de plafonner les impôts directs à 50 % des revenus ?

L'ex-Premier ministre Alain Juppé a ouvert le feu en déclarant que cela ne le « choquerait pas qu'on demande aux très riches un effort de solidarité supplémentaire ». Jean-François Copé lui-même, le président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, qui avait pourtant été à l'initiative du bouclier fiscal en 2006 quand il était ministre du Budget sous le gouvernement Villepin, fait maintenant machine arrière et affirme qu'il n'a « pas de religion définitive » sur ce sujet. Et Villepin lui-même, qui ne manque pas une occasion de contrer Sarkozy, demande « une fiscalité plus juste » en s'élevant « contre le cadeau fait aux riches ». Par ailleurs, treize députés de l'UMP ont appelé « à suspendre le bouclier fiscal pour redonner du sens à la politique ».

Ces membres de l'UMP qui critiquent maintenant le bouclier fiscal ne remettent évidemment pas en cause la politique menée par le gouvernement en faveur des possédants et des plus riches. Mais ils n'oublient pas au passage la défense de leurs propres intérêts. Or les mauvais résultats de l'UMP aux dernières élections régionales leur font craindre pour leur avenir et ils savent qu'ils perdront leur place si l'actuelle majorité subit une défaite aux élections présidentielle et législatives dans deux ans. La forte abstention ou le retour de voix vers le Front National lors des régionales étaient le signe que le mécontentement avait gagné une partie de l'électorat de droite, qui n'est pas uniquement implanté dans les beaux quartiers. De nombreux petits bourgeois - commerçants, artisans, paysans, etc. - mais aussi des ouvriers, qui avaient cru que Sarkozy améliorerait leur sort, sont aujourd'hui confrontés à une baisse de leurs revenus due à la crise, et sont choqués de voir le gouvernement continuer à favoriser les plus riches tandis qu'eux s'enfoncent dans les difficultés. Et ils sont bien plus nombreux que les quelques milliers de privilégiés bénéficiant du bouclier fiscal.

De plus, avant même que les discussions avec les syndicats n'aient commencé, le gouvernement évoque aussi la possibilité d'augmenter la CSG et le CRDS pour financer les retraites. Cette mesure frapperait tout le monde, y compris les personnes trop pauvres pour payer l'impôt sur le revenu, mais les contribuables qui, grâce au « bouclier », bénéficient du plafonnement de leurs impôts directs en seraient de ce fait épargnés ! Une telle mesure, si elle devait s'appliquer, risquerait de toucher, en même temps que les plus pauvres, la fraction de l'électorat de droite qui ne bénéficie pas de la protection du bouclier fiscal. Car cela apparaîtrait comme le début d'une remise en cause de l'engagement de Sarkozy de ne pas alourdir les impôts.

Pour l'instant, sourd aux appels venant de sa majorité, Sarkozy déclare qu'il va « maintenir le cap », et qu'il n'est pas question de revenir en arrière sur le bouclier fiscal. Mais on n'a peut-être pas fini de voir des députés UMP se démarquer à telle ou telle occasion d'un président dont ils considèrent le voisinage comme de plus en plus encombrant.

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