Après la tempête Xynthia : Victimes de l'inondation... et de l'incurie criminelle de l'État25/03/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/03/une2173.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Après la tempête Xynthia : Victimes de l'inondation... et de l'incurie criminelle de l'État

Trois semaines après la tempête Xynthia du 28 février dernier, Sarkozy s'est à nouveau rendu en Charente-Maritime et en Vendée pour expliquer, un peu tard, qu'il ne fallait pas construire en zone inondable, et pour tenter d'en rejeter la faute sur les responsables locaux.

Le 16 mars à La Rochelle, il a ainsi évoqué une « cascade de décisions litigieuses ou contraires au bon sens, de négligences, de prescriptions non respectées, d'expertises négligées », rejoignant sur ce terrain de Villiers qui affirme que « beaucoup d'élus municipaux, à qui revient la délivrance des permis de construire, ont trop tendance à privilégier le développement local sur la sécurité physique ». Pourtant, comme l'explique le maire de Charron, en Charente-Maritime, il est difficile à un maire de refuser un permis de construire dans une zone qui n'est pas déclarée impropre à la construction. Et ce sont les services de l'État qui décident des PPR (plans de prévention des risques naturels prévisibles), dans lesquels des zones interdites à la construction sont délimitées. La tâche de définir des PPR est elle-même entravée par le démantèlement des DDE (directions départementales de l'Équipement), qui collaboraient à l'étude préventive des risques.

Les élus locaux ont certainement des responsabilités, mais l'État est doublement en cause, à la fois pour la prévention du péril et pour l'absence d'évacuation. Comment expliquer que les zones inondables du littoral n'aient pas été évacuées la veille de la tempête ? Les services météorologiques avaient pourtant prévu le scénario exact : au niveau d'eau d'une pleine mer de grande marée s'est ajoutée une surcote de près de deux mètres, due à la dépression et à la houle. On pouvait donc prévoir que la mer passerait par-dessus certaines digues pas assez hautes, et en ferait céder d'autres, non prévues pour de telles conditions. Alors, pourquoi aucune évacuation n'a-t-elle été ordonnée par les Préfectures ? Parce qu'il n'existait aucun plan centralisé au niveau de l'État prévoyant une telle évacuation en fonction du niveau de l'eau.

Non seulement un tel plan n'existait pas, mais le simple recensement de l'ensemble des digues existant en France, commencé en 1994, n'est toujours pas achevé aujourd'hui, faute de moyens. Comment un plan d'ensemble centralisé aurait-il été envisageable, alors qu'il aurait dû prendre en compte la hauteur des digues ? De plus, l'entretien des digues est à la charge de leur propriétaire - agriculteur ou autre particulier, commune, communauté d'agglomérations, département - qui n'est pas toujours connu ou recensé !

De toute façon, en termes de réglementation centralisée et de prévention des risques, la tendance au plus haut niveau de l'État était en sens opposé. Sarkozy, à la botte de ses amis bétonneurs, ne déclarait-il pas en avril 2009 (discours sur le Grand Paris) qu'il fallait « rendre constructibles les zones inondables », et que « le problème c'est la réglementation » ?

Grâce aux carences des réglementations de l'État, les promoteurs immobiliers et les banques qui finançaient leurs projets ont fait des profits en bâtissant en zone inondable. Ils partagent avec lui la responsabilité criminelle des conséquences de Xynthia, dont la majorité des cinquante-trois victimes ont été tuées par l'inondation.

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