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- Lutte ouvrière n°2163
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Leur société
À la recherche de la carte « d'identité nationale »
De nombreuses personnes témoignent ces derniers mois des abus et tracasseries que leur fait subir l'administration, à l'occasion du renouvellement de leur carte d'identité, ou de l'établissement d'un passeport biométrique alors qu'elles sont de nationalité française.
Auparavant, il suffisait d'amener l'ancienne pièce pour avoir un renouvellement, et pour la plupart des citoyens français, cela suffit. Mais, les personnes nées hors de France, ou de parents nés hors de France, doivent maintenant prouver qu'elles sont bien « françaises ». Le fait que les préfectures demandent des pièces supplémentaires à ces catégories de personnes n'est pas nouveau. Ce qui est nouveau, c'est que les exigences administratives sont systématiques, tatillonnes et souvent kafkaïennes. Par exemple, le fait d'avoir eu une carte d'identité française pendant toute sa vie, effectué son service militaire en France, voté à toutes les élections, ne suffit pas quand les parents sont nés à l'étranger. Et quand on a le malheur d'être né à l'étranger, le fait d'avoir ses parents français, ses grands-parents français, ses arrière-grands-parents français ne suffit pas non plus. Désormais, il faut en effet produire le « certificat de nationalité », papier-sésame délivré par le tribunal d'instance.
De plus en plus de gens concernés par ce problème racontent ce qui ressemble à un véritable parcours du combattant. D'abord, l'administration essaye d'insuffler un sentiment de culpabilité à tous ces demandeurs, la préfecture les soupçonnant d'avoir fraudé sur leur véritable nationalité. Ensuite, l'absence de passeport ou de carte d'identité peut avoir des conséquences bien réelles, bien concrètes. Un commerçant des Alpes-Maritimes raconte qu'il a dû batailler pendant cinq ans, avant que le tribunal lui rende ses papiers et que, pendant ces années, on l'a « mis dans la misère », car on lui avait retiré également sa licence de débit de boissons. D'autres ont perdu leur emploi, car leur profession exigeait qu'ils aillent à l'étranger... avec un passeport. Pour tous, cela a été beaucoup de désagréments, souvent des vacances à l'étranger ratées. Et surtout des jours et des jours perdus à essayer de s'expliquer devant des représentants de l'administration, qui parfois en rajoutent sur les pièces nécessaires pour se couvrir vis-à-vis de leur hiérarchie. Les semaines et des mois passés à chercher des documents familiaux peut-être détruits par les déménagements, la guerre, ou les incendies, ou tout simplement introuvables.
Selon le ministère de la Justice, 170 000 personnes auraient demandé ce certificat de nationalité en 2002, et à l'époque, 5 % de ces demandeurs ne l'avaient pas obtenu. Pour 2007, dernières statistiques fournies, le pourcentage des refus est passé à 12 %, pour un nombre de demandes légèrement inférieur. Ces chiffres et ces témoignages, indiquent un durcissement évident des procédures. Cette chasse aux vrais-faux Français entre tout à fait dans la démagogie du gouvernement « tout ce qui est étranger est suspect », et lorgnant vers les thèmes d'extrême droite. Et les ministères concernés, l'Intérieur, la Justice et l'Identité nationale obéissant jusqu'à l'absurde, à des consignes mûrement élaborées. Ce serait tout de même plus simple de vivre dans un monde où les « cartes d'identité » nationales et autres passeports seraient relégués au musée de l'histoire !