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- Lutte ouvrière n°2158
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Mayotte : Manifestations contre la vie chère et politique criminelle contre les non-Mahorais
Le 2 décembre, à Mayotte, des manifestations contre la vie chère ont débouché sur des affrontements avec les forces de répression, dans cette petite île de l'océan Indien maintenue dans le giron de la France et séparée du reste de l'archipel des Comores.
À l'origine, une manifestation était organisée à l'appel d'un « collectif des citoyens perdus de Labattoir et Pamadzi », deux localités de Petite-Terre, une île de 15 km² séparée par un bras de mer de deux kilomètres de Grande-Terre, la principale île de Mayotte. Il s'agissait de montrer l'exaspération de la population face au coût exorbitant de la vie. À titre d'exemple, une mère de famille dénonçait le prix de 50 euros pour un carton de mabawa (ailes de poulet). Cette manifestation visait également l'augmentation programmée par le Conseil général du prix d'accès aux barges assurant la liaison très fréquentée entre les deux îles, de 0,75 à 1 euro, et l'augmentation de 8 % des factures d'électricité. Des manifestants réclamaient aussi la démission d'Ahamed Attoumani Douchina, président UMP du Conseil général, dont la gestion est très contestée.
De nombreux barrages ont été érigés sur les routes et les affrontements opposant des jeunes aux gendarmes mobiles ont été très violents ; plusieurs gendarmes ont été blessés, dont un très grièvement, ainsi qu'une douzaine de manifestants. Le gouvernement s'est d'ailleurs empressé d'envoyer des renforts depuis l'île de la Réunion.
Parallèlement, la France continue de mener sa politique criminelle de chasse aux « non-Mahorais », c'est-à-dire contre les ressortissants des autres îles de l'archipel. Éric Besson s'est ainsi glorifié que « 17 555 étrangers en situation irrégulière ont été reconduits aux Comores depuis le début de l'année 2009, contre 16 040 pour l'ensemble de l'année 2008 ». Il faut dire que, parmi ceux que Besson classe dans la catégorie des immigrés clandestins faisant l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière, figurent de nombreuses personnes relevant d'un titre de séjour régulier, comme des parents d'enfants nés et scolarisés à Mayottte. Les chiffres sont d'autant plus grands qu'une législation dérogatoire, spécifique à ce territoire, fabrique des clandestins par milliers et les prive de tout recours effectif contre une mesure d'éloignement.
Il faut ajouter que, si Mayotte est « singulièrement sous-dotée » sur le plan budgétaire, comme l'ont récemment dénoncé deux sénateurs, les moyens (renforcement des effectifs de la Police des frontières, vedettes rapides, radars sophistiqués...) pour renforcer le mur érigé entre Mayotte et le reste des Comores ne cessent d'augmenter. Le bras de mer entre l'île d'Anjouan et Mayotte, qu'essayent de franchir les frêles embarcations de migrants, est ainsi devenu un cimetière marin. Fin novembre, au moins vingt et une personnes, dont cinq enfants, ont encore trouvé la mort après le naufrage de leur embarcation.
Il y a peu, à l'occasion de la célébration de la chute du mur de Berlin, Sarkozy lançait un appel « à combattre les murs qui, à travers le monde, divisent encore des villes, des territoires, des peuples ». Il aurait été plus crédible si la politique de son gouvernement ne consistait pas, entre autres, à renforcer ce mur qui isole Mayotte des autres îles de l'archipel des Comores.