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Dans le monde
Brésil : Lula, champion de l'écologie ? À d'autres !
Lula, le président du Brésil, et Sarkozy affirment leur plein accord en matière de défense de l'environnement, déclarant qu'ils présenteront ensemble, au sommet de Copenhague sur le climat en décembre, des propositions visant à limiter le réchauffement climatique et à réduire de 50 % d'ici 2050 les émissions de CO2, le principal gaz à effet de serre.
Si Sarkozy s'affiche ainsi en compagnie de l'ancien militant syndicaliste devenu président du Brésil, c'est que celui-ci jouit, bien à tort, d'une solide réputation de défenseur de la nature. En tout cas, il ne manque jamais de s'afficher comme tel. En juin dernier par exemple, lors de la journée mondiale de l'environnement, il expliquait qu'il est essentiel de s'occuper de la nature, parce que d'elle dépend l'avenir de l'humanité.
Sauf que Lula n'a pas fait grand-chose pour l'environnement, depuis sa prise de pouvoir début 2003. Et depuis 2007, au nom de la défense de la croissance et des exportations, il a laissé les industriels de l'agriculture et de l'élevage saccager cet environnement, et en particulier la forêt amazonienne qui couvre un tiers du pays et représente cinq fois la superficie de la France.
En effet, avec le boom des prix agricoles en 2007, ce secteur est devenu le premier secteur exportateur du pays. Lula s'est alors mis à dénoncer toutes les « entraves à la croissance économique » que constituent les communautés indiennes, les petits paysans ou l'environnement.
La déforestation, qui avait été d'abord surveillée et quelque peu limitée, s'est déchaînée, battant des records. Et comme elle s'accompagne de brûlis, le Brésil est devenu gros émetteurs de CO2. La forêt est pour les trois quarts remplacée par des élevages de bovins, qui sont eux aussi de grands producteurs de gaz à effet de serre.
Le reste de terres ainsi libérées est occupé par des plantations de soja et de canne à sucre. Le gouvernement de Lula a autorisé les semences de soja transgénique. Les plantations de canne à sucre ont pu s'installer sur les rives du rio Madeira, où elles étaient jusque-là interdites. La canne ne sert pas à produire essentiellement du sucre, mais du carburant éthanol.
Pour compenser la déforestation, il y a bien des programmes de plantation d'arbres. Mais les espèces qui sont plantées sont surtout du genre « fast-wood », des arbres qui poussent rapidement, comme l'eucalyptus, pour fournir de la cellulose aux usines de pâte à papier.
Même les travaux d'infrastructure, comme l'asphaltage des routes dans la région amazonienne, se tournent contre l'environnement. Ces routes plus facilement carrossables permettent l'arrivée de ceux qu'on appelle les « gangsters de la forêt », qui à coups de tronçonneuse et en toute illégalité, abattent les bois précieux. Et, tout comme les hommes de main des grands propriétaires, ils ont le coup de fusil facile contre l'Indien ou le petit paysan qui se trouve sur leur chemin.
Cette destruction de la forêt s'accompagne de mesures contre tous les opposants ou les gêneurs : tribus indiennes dont les réserves sont impitoyablement grignotées, paysans indépendants expropriés de force et chassés de leurs terres, ouvriers agricoles réduits à un quasi-esclavage. Le gouvernement vient d'autoriser l'embauche d'ouvriers agricoles sans contrat de travail pendant dix mois !
Cette politique de Lula a fini par entraîner en août dernier la démission de Marina Silva, sa ministre de l'Environnement, une militante écologiste amazonienne qui lui servait d'alibi. Elle a été remplacée par un homme dont le plus grand titre de gloire est d'avoir réussi en un temps record à autoriser la construction d'un complexe pétrochimique dans la région de Rio.
Voilà comment Lula « s'occupe » de l'environnement dans son propre pays. Cela n'autorise pas grand espoir concernant la défense de la nature à l'échelle de la planète.