- Accueil
- Lutte ouvrière n°2151
- Le quartier de la Défense et l'EPAD : Il y a des tours qui rapportent
Leur société
Le quartier de la Défense et l'EPAD : Il y a des tours qui rapportent
Si la probable élection de Jean Sarkozy a attiré l'attention sur l'EPAD, ce n'est pas d'aujourd'hui que celui-ci aiguise les appétits. Depuis sa création en 1958, l'EPAD, l'Établissement public d'aménagement de la Défense, a été un des hauts lieux de la spéculation immobilière de bureaux.
Voulu par tous les grands promoteurs de l'époque, soutenu par les grandes sociétés capitalistes françaises ou présentes en France, décidé par de Gaulle, il a été depuis un panier de crabes, où les hommes politiques gaullistes sévissaient pour le plus grand profit de leurs copains promoteurs.
« Tout était préparé à l'avance par des fonctionnaires, sur appel d'offres restreint. Jamais je n'ai ouvert une enveloppe d'adjudication. Tout était préparé, pour d'énormes sommes, dans le secret douillet des bureaux administratifs », racontait un maire socialiste de Puteaux des années 1970. Un des grands scandales financiers des années 1980-1990 s'était soldé par la condamnation du promoteur Christian Pellerin : il avait participé à la construction des trois quarts des tours de la Défense, fait sa richesse et celle de quelques autres, au prix de certaines libertés avec les lois, en arrosant au passage quelques politiciens arrangeants.
Aujourd'hui, pas grand-chose n'a changé. L'EPAD, contrôlé étroitement par les politiciens de droite, règne sur un royaume de 160 hectares situé sur les communes de Puteaux et de Courbevoie : 3 350 000 m² de bureaux, soit 5 % du marché francilien, 600 000 m² de logements, 200 000 m² de commerces, dont le grand centre commercial des Quatre-Temps. La Défense représente le plus grand quartier d'affaires de France, un des plus grands d'Europe. 2 500 entreprises y ont leurs bureaux, dont de nombreux sièges sociaux d'entreprises internationales. 150 000 salariés y travaillent.
C'est aussi un énorme pactole pour les promoteurs, bétonneurs et futurs propriétaires de tours. L'EPAD contrôle « les droits à construire » sur son territoire, droits qui se chiffrent en centaines de millions d'euros. Si le chiffre d'affaires de l'EPAD se monte à 115 millions d'euros pour 2008, il est prévu qu'il atteigne bientôt un milliard d'euros avec la construction de nouvelles tours.
Car malgré la crise de l'immobilier, malgré le stock de bureaux vides (4 % à la Défense, et même 7 % sur la région parisienne), la frénésie de construction ne s'est pas arrêtée. Nicolas Sarkozy, quand il était encore président du Conseil général des Hauts-de-Seine, et également président de l'EPAD, a décidé en 2006 l'extension de la Défense. Un décret prévoit sa fusion en décembre prochain avec l'établissement public voisin qui est chargé d'aménager 320 hectares sur la commune de Nanterre. D'autres terrains appartenant à Nanterre et à La Garenne-Colombes vont également être annexés. À terme, l'EPAD contrôlera 770 hectares de l'Ouest parisien, dont la moitié du territoire de la commune de Nanterre.
Si la construction de bureaux développait vraiment l'économie, depuis le temps, ça se saurait. Mais ce qui est sûr, c'est que c'est un moyen d'enrichir à coup sûr un bon nombre de promoteurs, et un vivier pour politiciens pleins d'appétit.