Turquie - 33 morts et des dégâts considérables - L'affairisme et la corruption inondent Istanbul18/09/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/09/une2146.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Turquie - 33 morts et des dégâts considérables - L'affairisme et la corruption inondent Istanbul

Le 9 septembre, de violents orages accompagnés de fortes pluies ont fait 33 morts, plusieurs disparus et des dégâts considérables dus aux inondations dans la région d'Istanbul, notamment près de l'aéroport. Le gouvernement et les autorités ont expliqué avec insistance qu'il s'agirait des plus fortes pluies depuis quatre-vingts ans, qu'ils avaient déjà essayé de prendre certaines mesures mais qu'ils n'ont pas été assez écoutés et que désormais les mesures qui s'imposent seront prises. Double, voire triple mensonge.

En fait, déjà en 1978 il y a eu de violents orages avec de très fortes pluies dans ces régions, notamment près de l'aéroport d'Istanbul, dans la vallée d'Ayamama où l'on a recensé la plupart des morts. À l'époque, il n'y avait eu ni morts ni dégâts... Mais le lit de la rivière n'était pas encore bouché par des constructions et tout autour il y avait des champs ou espaces verts.

C'est à partir des années 1990 qu'une grande spéculation foncière a commencé à sévir dans les environs d'Istanbul, notamment dans la zone de l'aéroport. Et dès cette époque différentes associations, notamment la Chambre des ingénieurs et architectes turcs (TMMOB) avaient averti à de multiples reprises que « ce plan urbain, approuvé par les autorités municipales, ne tenait pas compte du fait que la vallée d'Aymama était un lit de rivière et qu'avec la destruction des espaces verts et la construction des bâtiments et des routes on préparait le terrain pour de futures catastrophes ». Divers procès avaient été intentés contre ce projet et même certaines condamnations avaient été prononcées par des tribunaux, sans être cependant suivies d'effet.

Ce n'est pas tout puisque déjà en 1995, alors que la Première ministre était Tansu Ciller et que le maire d'Istanbul n'était autre que Recep Tayyip Erdogan, l'actuel Premier ministre, il y avait eu de fortes inondations dans cette région avec beaucoup de dégâts et on avait parlé... de faire le nécessaire.

Parmi les morts du 9 septembre on trouve treize chauffeurs routiers. À l'heure de l'inondation ceux-ci dormaient dans leur camion, garé avant leur départ dans l'entreprise privée de transports construite justement en plein milieu de la vallée d'Ayamama. Le propriétaire de cette entreprise serait un ami très proche d'Erdogan. Quel hasard ! Contre toute logique et bon sens, il a obtenu une « autorisation » pour cette construction qui, en bouchant le lit de la rivière, a empêché l'écoulement des eaux.

L'urbanisation, la déforestation, la construction sauvage dans la vallée et sur les collines alentour alors que rien n'était prévu pour l'écoulement des eaux en cas de forte pluie, tout cela a contribué à la catastrophe, ne laissant à l'eau comme issue que l'autoroute proche. Or, aux premières heures de la matinée, c'est une voie essentielle de circulation parcourue par de nombreux camions, autobus et minibus menant les habitants à leur travail, et très souvent embouteillée. Elle s'est transformée en un piège pour tous ceux qui ont été surpris par la montée des eaux autour de leur moyen de transport sans pouvoir s'en échapper.

Malheureusement, les morts ne sont pas les criminels qui défient tranquillement toutes les lois sociales et naturelles pour gagner le plus d'argent possible. Ce sont ces treize camionneurs surpris dans leur sommeil, emportés avec leur camion. Ce sont aussi entre autres sept ouvrières du textile noyées dans le fourgon qui les amenait au travail, prévu pour le transport de marchandises. Le conducteur a pu s'échapper et sauver sa vie, mais les ouvrières sont restées prisonnières à l'arrière.

Les morts du 9 septembre ne sont pas à imputer à la catastrophe naturelle, mais au comportement sauvage de profiteurs et de spéculateurs en tout genre qui ont prospéré ces dernières années, sans aucun égard pour les conditions de vie et de travail de la population d'une ville qui, en quelques années, est passée de 4 millions à plus de 12 millions d'habitants.

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