Grève du lait : Paysans et consommateurs solidaires18/09/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/09/une2146.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Grève du lait : Paysans et consommateurs solidaires

Jeudi 10 septembre, des producteurs de lait ont entamé une « grève du lait » pour protester contre la baisse du prix auquel les industriels leur achètent leur lait, une baisse responsable d'une diminution de leurs revenus estimée à près de 30 % depuis un an.

Les paysans en grève ont cessé leurs livraisons aux laiteries, certains ont déversé le contenu de camions-citernes devant des grandes surfaces, pendant que d'autres distribuaient le lait à la population sur les marchés ou dans les fermes.

La grève a été lancée à l'appel de l'EMB (European Milk Board), une organisation qui revendique plus de 100 000 adhérents dans quatorze pays, et serait suivie dans plusieurs pays européens gros producteurs de lait, comme l'Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et l'Italie. En Belgique, des paysans ont déversé des citernes de lait sur les autoroutes. En France, seuls deux petits syndicats, l'APLI (Association des producteurs de lait indépendants) et l'OPL (Organisation des producteurs de lait), y ont appelé. La Confédération paysanne n'en a pas fait autant, par crainte dit-elle, de conséquences financières trop importantes pour les paysans, mais certains de ses militants ont participé au blocage de la collecte du lait, notamment dans l'Ouest. Quant à la FNSEA, principale organisation agricole, mais marquée à droite, elle a estimé que cette grève était une « aberration », prouvant, s'il le fallait, qu'elle préférait à la grève les négociations avec le gouvernement.

Les consommateurs, en tout cas, n'ont manifestement pas trouvé aberrante cette « grève du lait ». Ainsi à Nantes 2 000 litres de lait ont trouvé preneurs en moins de deux heures et, alors que les paysans demandaient 25 centimes d'euros par litre de lait pour payer la bouteille et le bouchon, les « acheteurs » ont donné en moyenne 50 centimes, soit près du double du prix (de 26 à 28 centimes le litre) fixé en juin par le gouvernement et la FNSEA.

Il est aisé de comprendre qu'aucun travailleur, paysan ou salarié, ne peut vivre avec des revenus diminués de 30 % en un an. D'autant plus que, si les revenus des paysans s'effondrent, les marges des industriels de l'agroalimentaire (Danone, Lactalis ou Entremont) et de la grande distribution (Leclerc, Auchan, Carrefour, etc.) ne font qu'augmenter. D'après le Journal du Dimanche, la marge par litre de lait des industriels serait passée en un an de 41,6 % à 52,1 % et celle des distributeurs de 12,8 % à 17,1 %. Et chaque consommateur voit bien que le prix du lait en grande surface n'a pas baissé et qu'il est revendu près de quatre à cinq fois plus cher au public qu'il n'est payé au paysan.

Les paysans en lutte demandent que le prix du litre de lait soit augmenté à 40 centimes d'euro. Mais avant la grève, le gouvernement et Bruxelles ne faisaient même pas mine d'entamer des négociations sur les prix et réaffirmaient leur volonté de déréguler le marché avec la fin annoncée pour 2015 des quotas laitiers, ce qui signifierait une nouvelle baisse des prix. Ils font ainsi le jeu des industriels de l'agroalimentaire et de la grande distribution, qui entendent bien continuer à fixer les prix en usant et en abusant de leur position de quasi-monopole pour imposer aux paysans les prix d'achat les plus bas et aux consommateurs les prix de vente les plus élevés possible.

Face à eux, les intérêts des producteurs et des consommateurs sont communs, ce qu'ont bien compris tous ceux qui ont montré leur sympathie aux paysans « grévistes du lait ».

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