Les producteurs en colère : L'industrie et la grande distribution en accusation18/06/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/06/une2133.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Les producteurs en colère : L'industrie et la grande distribution en accusation

Samedi 13 juin, cessait le blocage national de trois jours des plates-formes d'approvisionnement des grandes surfaces par les producteurs de lait, rejoints cette fois par des producteurs de fruits, de légumes ou de porcs, confrontés à une même baisse de leurs revenus. Ce blocage, auquel avait appelé la principale organisation professionnelle agricole (la FNSEA), a ramené au premier plan de l'actualité le scandale que dénoncent à juste titre, depuis des semaines, les producteurs de lait : celui des prix que leur versent la grande distribution et les industriels-transformateurs, des prix qui ont fortement baissé depuis un an, au point de devenir inférieurs à leurs coûts de production. Cela alors que les prix du lait et des produits laitiers dans le commerce, eux, n'ont pas baissé, voire ont augmenté.

Avec ces blocages, la FNSEA a sans doute cherché à redorer son blason après l'accord qu'elle avait signé, juste avant les européennes, avec la grande distribution et les industriels. Cet accord, parrainé par le gouvernement, ne pouvait pas apaiser les producteurs car, s'il relevait un peu le prix du lait, il le maintenait en dessous des 300 euros les mille litres qu'ils revendiquent pour amortir leurs coûts. En fait, la FNSEA, marquée à droite, n'avait pas voulu gêner le gouvernement, en particulier le ministre de l'Agriculture, Michel Barnier, qui conduisait la liste UMP d'Île-de-France aux européennes.

Mais, passé les élections, les problèmes sont toujours là, et la colère des producteurs de lait aussi. Et d'ailleurs, de nouveaux blocages ont repris après l'action nationale à laquelle avait appelé la FNSEA. Du coup, Barnier fait de grandes « découvertes » et déclare maintenant qu'« il faut que la grande distribution joue le jeu de la transparence » en matière de prix et de marges. Évitant au passage de faire même semblant de critiquer les industriels de l'agro-alimentaire, il promet de « généraliser les contrôles »... sans rappeler, et pour cause, que la loi dite de « modernisation de l'économie », mise en place par ce gouvernement, les prévoit déjà. Avec l'efficacité que l'on voit !

Car, quand bien même il y aurait assez d'inspecteurs de la concurrence et de la consommation pour effectuer des contrôles fréquents et systématiques, ce qui est loin d'être le cas, aucune loi n'interdit aux Danone, Candia, Président, Carrefour, Leclerc, Auchan et autres géants de l'agro-alimentaire ou de la distribution de fixer leurs prix comme ils l'entendent. Et ils ne se privent pas d'user de leur situation dominante pour imposer à la fois les prix d'achat les plus bas aux producteurs et les prix les plus élevés possible aux consommateurs.

Indigné d'avoir été la cible - alors qu'il se prétend sans rire absolument innocent - de certains blocages ces jours derniers, Édouard Leclerc s'est écrié dans Le Figaro, à propos des mesures annoncées par le gouvernement : « Qu'on arrête le cinéma ! L'administration connaît parfaitement les marges de chaque distributeur et de chaque magasin. » Il sait de quoi il parle... Comme le soulignaient à leur façon des producteurs de lait, qui rappelaient que la loi LME a eu pour effet de renforcer le poids des grosses centrales d'achat et des industriels au détriment des agriculteurs, le gouvernement est d'abord là pour veiller aux intérêts du grand capital, dans le commerce comme dans l'industrie.

En fait, le seul vrai contrôle efficace sur les prix et les profits, c'est celui qu'exerceraient les producteurs, les consommateurs et les travailleurs mobilisés pour y aller voir de plus près dans tous les comptes des capitalistes.

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