Après la journée syndicale du 13 juin : Des dirigeants qui ne font rien pour renforcer les travailleurs18/06/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/06/une2133.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Après la journée syndicale du 13 juin : Des dirigeants qui ne font rien pour renforcer les travailleurs

Tout le monde l'a dit et répété, les manifestations du samedi 13 juin ont regroupé moins de monde que celles du 1er mai : 150 000 dans tout le pays, selon les syndicats, contre 1,2 million le 1er mai.

Les dirigeants syndicaux se sont empressés de donner de soi-disant bonnes raisons à cette baisse de participation. Le dirigeant de la CGT, Bernard Thibault, a ainsi déclaré qu'il y aurait « légitimement un peu de fatigue ». François Chérèque, le secrétaire général de la CFDT, lui a fait écho en avançant « une sorte de fatigue ». Mais, dès avant le 13 juin, tous deux avaient annoncé l'échec. Ainsi le 11 juin, Thibault prophétisait la baisse du nombre de manifestants. Le même déclarait dans le journal la Tribune du 12 juin : « Notre objectif est qu'il y ait la plus grosse participation possible, même si nous avons conscience qu'il n'y aura pas forcément autant de monde que les fois précédentes. »

Jean-Claude Mailly, le dirigeant de Force Ouvrière, a appelé à cette journée tout en la critiquant, ce qui a amené des Unions départementales FO à ne pas appeler à manifester du tout ce jour-là. Son attitude ne vaut pas mieux. Mais elle a permis à Thibault, tout comme à Chérèque, d'avancer une nouvelle explication au peu de succès du 13 juin : la division syndicale. « Quand tout le monde ne parle pas d'une même voix, cela ne peut que démobiliser », a déclaré le secrétaire général de la CGT.

Dans tout cela, les dirigeants syndicaux ont bien évidemment passé sous silence leur responsabilité, en particulier dans la faiblesse de la préparation de cette journée du 13 juin. Mais ce facteur-là a été, par contre, beaucoup discuté dans les rangs des manifestants. Car pour nombre de militants il est évident que les confédérations syndicales ne cherchent absolument pas à renforcer les travailleurs avec une stratégie de mobilisation claire.

Les directions syndicales sont en effet plus préoccupées de garder leur rôle de négociateurs avec le gouvernement et le Medef que de chercher les moyens d'inverser le rapport de forces en faveur des travailleurs. Le secrétaire général de la CFDT donnait ainsi comme « objectif » à la journée du 13 juin le fait de « marquer le coup » avant la rencontre début juillet avec Sarkozy ; une rencontre dans laquelle il s'agirait de faire un « bilan d'étape » avec le président de la République sur les mesures gouvernementales contre la crise ! Rien ne sortira évidemment de cette rencontre, mais aucun des dirigeants syndicaux ne voudrait rater un rendez-vous avec le président de la République ou la présidente du Medef, Laurence Parisot.

Il est vrai que beaucoup de travailleurs se sentent écrasés sous les attaques du patronat et du gouvernement et ne se sentent pas en état de réagir. Mais ce ne sont pas les initiatives et plans de mobilisation syndicale, voués d'avance à l'échec, qui peuvent les enthousiasmer et les inciter à le faire. Car l'explosion sociale nécessaire qu'espèrent de nombreux travailleurs et militants, les confédérations syndicales, elles, la craignent. La déclaration d'un Chérèque, mettant en quelque sorte en garde contre les « risques d'embrasement » dans les entreprises et chez les jeunes, est à cet égard bien significative.

Toute la stratégie des dirigeants syndicaux depuis des mois a été de laisser s'exprimer le mécontentement lors de journées d'action bien contrôlées, avec pour seul objectif de faire reconnaître au gouvernement et au patronat leur qualité d'interlocuteurs responsables. Mais ceux-ci ne les en remercient pas pour autant.

L'« embrasement » que craint Chérèque aura lieu malgré tout tôt ou tard, car c'est le patronat et le gouvernement qui le préparent par leurs attaques et leurs provocations. Mais si réaction générale des travailleurs il y a, il faudra surtout que ceux-ci ne s'en remettent pas à des Chérèque ou des Thibault pour la diriger.

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