Le patron de l'entreprise textile Carreman, sous prétexte de difficultés économiques, licencie neuf des 90 salariés de son siège social de Castres. Il leur a fait la proposition scandaleuse d'aller travailler dans une autre usine du groupe, à ceci près qu'elle est située... en Inde, pour un salaire de 69 euros brut par mois pour six jours de travail.

Carreman n'est pourtant pas une société en faillite, puisqu'elle compte une autre unité en France, en Ariège, et qu'elle en avait ouvert deux avec 600 salariés en 2005, en Roumanie et en Inde.

L'émotion a été d'autant plus vive à cette annonce qu'un des deux patrons s'est permis des déclarations provocantes affirmant qu'il ne faisait qu'appliquer la loi, « une loi française qui nous oblige à faire par écrit une proposition de reclassement si on dispose d'autres sites, même si c'est en Papaousie ou au Bangladesh ». Et d'ajouter cyniquement : « C'est stupide, mais c'est la stupidité de la loi. »

En tout cas les patrons de Carreman n'ont pas hésité à utiliser cette loi « stupide » mais si pratique car, en faisant des propositions inacceptables que les salariés ne peuvent que refuser, ils peuvent les licencier pour « refus de mutation » et éviter ainsi toute contestation devant les tribunaux.

D'autres patrons ont d'ailleurs largement utilisé ces méthodes. En 2005, six travailleurs d'une usine alsacienne de bobines électroniques s'étaient vu proposer d'aller travailler 40 heures par semaine en Roumanie pour 110 euros brut. En avril 2008, l'équipementier automobile rennais La Barre Thomas avait proposé des reclassements en Pologne pour 700 euros brut par mois. Même l'ANPE avait proposé en 2008 un poste d'informaticien à Pondichéry pour 160 à 320 euros par mois.

Il n'y a pas si longtemps, des ouvriers indiens avaient carrément lynché un patron licencieur. Qu'est-ce que dirait le patron de Carreman si on lui proposait une mutation là-bas ?