Sommet de l'OTAN à Strasbourg : Le gouvernement a voulu empêcher toute manifestation08/04/20092009Journal/medias/journalnumero/images/2009/04/une2123.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Sommet de l'OTAN à Strasbourg : Le gouvernement a voulu empêcher toute manifestation

Strasbourg en état de siège pendant une semaine, des policiers mobilisés pour empêcher que les opposants au sommet de l'OTAN puissent manifester tandis que, dans le très déshérité quartier du Port, ils laissaient les habitants sans protection devant les déchaînements des « black-blocks » : voici l'image que toute une partie de la population retiendra du sommet de l'OTAN des 3 et 4 avril.

Une ville transformée en place forte

Déjà, depuis le début de la semaine, les habitants vivant autour du Palais des congrès ou du Parlement européen ne pouvaient plus sortir de chez eux sans montrer leur badge. Se promener en famille dans les forêts entourant Strasbourg le dimanche précédent était déjà prendre le risque d'être contrôlé par des gendarmes à cheval. Les rivières et les ruisseaux autour du Parlement étaient bordés de rouleaux de fil de fer barbelé et des escouades de policiers surveillaient le canal qui longe l'autoroute allant de l'aéroport au Parlement. Toutes les boîtes à lettres publiques sauf deux étaient condamnées et, sur les deux, une se trouvait en banlieue.

Vendredi 3 avril, il n'était plus question de prendre les autoroutes autour de la ville. D'ailleurs, les administrations et une grande partie des entreprises des zones industrielles avaient mis leur personnel en congé ou en chômage partiel, et les lycées étaient fermés. Tout le centre-ville était pratiquement inaccessible, et les barrages de police se déplaçaient au fil des heures, sans tenir compte de ce qui avait été annoncé à l'avance, obligeant les habitants et les gens qui y travaillaient à faire de multiples détours pour trouver le bon « check-point ».

Au moment de l'arrivée d'Obama et de Sarkozy au Palais de Rohan, dans le centre-ville, la circulation des trams et des bus a été arrêtée. Seuls quelques dizaines de militants UMP et quelques habitants, triés sur le volet, du quartier de la cathédrale décrétée « zone rouge » furent autorisés à venir faire la claque pour la photo : cela aurait fait mauvais effet de n'y voir que des uniformes !

La police veut empêcher la manifestation de se dérouler

À l'appel de différents partis et groupes, une manifestation était prévue contre la tenue du sommet de l'OTAN à Strasbourg pour le soixantième anniversaire de sa création. Les participants avaient été parqués à dix kilomètres du centre-ville, près du quartier du Neuhof, réputé comme l'un des plus misérables de Strasbourg. Depuis le milieu de la semaine, la police procédait sans arrêt à des contrôles d'identité aux alentours du camp et les incidents s'étaient multipliés.

Pendant les quinze jours qui ont précédé le sommet, le contrôle aux frontières avec l'Allemagne avait été rétabli, et quelque 7 000 Allemands qui voulaient manifester ont été retenus sur l'autre rive du Rhin.

Pendant toute la matinée du 4 avril, le quartier du Port du Rhin fut quadrillé par les forces de police, le temps que se déroule la rencontre symbolique entre les chefs des pays de l'OTAN. Après la photo de famille, tout le beau monde parti, la police a elle aussi disparu. Et c'est à ce moment que les black-blocks ont incendié différents bâtiments.

La manifestation s'était rassemblée sur un parking situé au pied du Pont de l'Europe. Quand elle voulut se diriger vers le centre, des voitures de police barraient la route, obligeant les manifestants à emprunter un étroit passage et créant la pagaille. Un kilomètre plus loin, ils rencontraient un nouveau barrage avec grilles et des dizaines de camions de CRS sur le pont menant à la ville : la manifestation n'eut d'autre choix que de prendre l'unique voie libre, menant à la zone portuaire. La seule issue, un passage sous les rails, était bloquée par la police, et quand les manifestants voulurent sortir de cette souricière, ils subirent des tirs de grenades lacrymogènes.

Après plus d'une heure, ils purent partir et gagner les ponts. Mais là encore, toutes les issues étant bloquées, il leur fallut faire plus de deux kilomètres avant de trouver un barrage de police filtrant qui laissait sortir, sur présentation de papiers d'identité.

Les incidents qui ont émaillé cette journée ont été dus en grande partie à la présence provocante des forces de police et au harcèlement qu'elles ont pratiqué contre les manifestants anti-OTAN. Il est évident que les directives données par les autorités, c'est-à-dire en dernier recours le gouvernement, ne visaient pas essentiellement au maintien de l'ordre, mais d'abord à empêcher toute manifestation visible contre la tenue de ce sommet et les chefs d'État qui y participaient.

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