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Dans le monde
Sarkozy au Proche-Orient : L'impérialisme français complice des assassins
Entre le 5 et le 7 janvier, au moment même où l'armée israélienne pénétrait dans la bande de Gaza après l'avoir bombardée des jours durant, Sarkozy a successivement rencontré le président égyptien Moubarak, le Premier ministre israélien Olmert, le président de l'Autorité palestinienne Abbas et les responsables libanais et syriens. Tout en assurant l'État d'Israël de sa solidarité, et ses gouvernants actuels de son amitié, il a demandé " l'arrêt des violences ", faisant mine de renvoyer les adversaires dos à dos.
Avant le départ du président français, le ministère des Affaires étrangères avait publié un communiqué reprenant celui de l'Union européenne et affirmant que " cette escalade militaire dangereuse complique les efforts engagés (...) pour faire cesser les combats, apporter une aide aux civils et aboutir à un cessez-le-feu permanent ".
Mais de quels " efforts " s'agit-il ? En fait l'ensemble des pays impérialistes, les États-Unis en tête et la France pas loin derrière, considèrent qu'Israël est leur représentant et le gardien de leur ordre dans cette région du monde. Aussi laissent-ils toujours les mains libres aux gouvernements israéliens. L'État d'Israël peut bien assassiner qui il veut, ses protecteurs et alliés impérialistes ne veulent pas prendre la moindre mesure qui puisse le contraindre à infléchir si peu que ce soit sa politique.
Au contraire même, l'Union européenne a récemment renforcé ses liens économiques et culturels avec l'État d'Israël, dans le cadre de ce qu'elle appelle un " rapport privilégié, construit sur un engagement mutuel sur des valeurs communes, dont la démocratie et les droits de l'homme ", droits qui ne semblent pas devoir s'appliquer aux Palestiniens !
Dans le cadre de ce soutien global, chaque grande puissance essaie de jouer sa propre partition, de faire valoir ses propres intérêts. C'est ce que fait Sarkozy en tentant de jouer les médiateurs et d'entretenir la fiction selon laquelle la France aurait une attitude de neutralité active, prenant aussi en compte, et plus que les autres, les intérêts des pays arabes.
Car l'impérialisme français a ses intérêts traditionnels à défendre au Moyen-Orient. Pour ne parler que des États limitrophes de la Palestine et visités par Sarkozy, le Liban et la Syrie furent sous mandat de la France entre les deux guerres mondiales, le premier reste dans sa zone d'influence, et il voudrait bien y ramener la seconde. L'État français intervient dans la politique intérieure libanaise, y a ses protégés, ses favoris, des liens financiers directs et même des complicités d'affaires. Le rapprochement avec la Syrie pourrait intéresser le développement des affaires de Total dans ce pays et celui de la compagnie maritime franco-libanaise CMA-CGM.
La visite du président français au président égyptien n'est pas elle non plus que de pure politesse : depuis le rachat d'une énorme cimenterie par Lafarge, la France est devenue le premier investisseur étranger en Egypte. Autant de raisons de tenter de maintenir l'idée que la France serait " pro-arabe ", ou moins anti-arabe que les autres.
Et puis, pour l'impérialisme en général et pour ses intérêts au Moyen-Orient, il faut avant tout s'assurer que l'ordre règne. Or la situation dans les territoires palestiniens et l'intervention actuelle soulèvent l'indignation des populations de la région, au risque de déstabiliser les régimes arabes. Car la solidarité verbale de ces régimes avec le peuple palestinien cache mal leur passivité devant les massacres, quand ce n'est pas leur complicité avec l'action d'Israël. Dans ces dictatures corrompues où la crise économique accroît encore la misère populaire, les manifestations de solidarité avec le peuple palestinien peuvent facilement se transformer en manifestations antigouvernementales.
Pendant que l'armée israélienne bombarde et massacre, les dirigeants impérialistes qui en sont les complices ont malgré tout besoin de maintenir la fiction selon laquelle ils chercheraient avant tout la paix et voudraient convaincre les deux parties de s'entendre. C'est ce à quoi contribuent, chacun à leur façon, l'ONU, les dirigeants européens, le Premier ministre turc au cours de sa tournée des capitales arabes, et enfin Sarkozy. Chacun sait d'ailleurs que, quand Israël estimera ne pas pouvoir aller plus loin dans ses objectifs, il faudra bien proclamer une trêve, et à ce moment-là l'ONU ou d'autres seront là pour servir d'intermédiaires, comme cela s'est fait au Liban. Tous diront alors que ce sera grâce à leurs efforts de " paix ".