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- Lutte ouvrière n°2109
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Leur société
À propos des déclarations de Bachelot : Quand la ministre invente des financements qui n'existent pas
À la suite de l'accident et de la mort d'un enfant de trois ans survenu à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul à Paris, l'attitude de la ministre de la Santé, Bachelot, a provoqué des protestations générales dans le milieu hospitalier. En effet, elle avait marqué son soutien de fait à la mise en garde à vue durant quarante-huit heures de l'infirmière incriminée. Du coup, Bachelot s'est sentie obligée de déclarer dans une interview au Figaro du 27 décembre : « Je suis fière de l' hôpital public ». Ce qui est pour le moins un contre-sens, étant donné la politique qu'elle y conduit en ce moment.
Elle y affirme : « Concernant le manque de moyens de l'hôpital public, je m'inscris en faux (...) Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit une augmentation des dépenses de 3,1 % ». Or, il s'agit là de toutes les dépenses de Sécurité sociale, pour tous les régimes confondus, maladie, vieillesse, allocations familiales. Quant au budget de la Sécurité sociale affecté aux hôpitaux, il comporte d'abord le financement des trusts pharmaceutiques, des fabricants d'équipements de santé et des géants du bâtiment dont la ministre paye toutes les factures, largement surévaluées, avec l'argent qui ne lui appartient pas, sans mégoter le moins du monde.
Bachelot continue : « Au total ce sont 2,5 milliards d'euros de plus qui vont être injectés dans l'hôpital l'an prochain. D'autant que ces sommes viennent compléter le plan hôpital 2012. Cette année 4 milliards ont déjà été dépensés sur cette enveloppe. » Alors de quoi se plaint-on ? Sauf qu'il s'agit d'une manipulation grossière. Tout d'abord le plan hôpital 2012 de dix milliards d'euros, pris sur le seul budget de la Sécurité sociale, sans que l'État ne verse un seul centime, est programmé sur cinq ans. Pour le moment une part infime a été dépensée. De plus, il ne vise en aucune façon à donner des moyens supplémentaires à l'hôpital public. Au contraire, il s'agit pour l'essentiel de financer les opérations immobilières permettant la fermeture d'hôpitaux et de services dans l'ensemble des hôpitaux publics du pays afin, comme il est dit, « d'en améliorer la compétitivité ». Par contre, des financements importants sont donnés aux patrons et actionnaires des cliniques privées, comme le trust Générale de Santé, afin de leur payer, avec l'argent des assurés sociaux, des cliniques toutes neuves, des centres d'examen, pendant que l'hôpital public, lui, va à la dérive ! Cela se passe dans tout le pays, comme à Marseille où, pour une seule nouvelle clinique, la Générale de Santé va recevoir beaucoup plus que tous les hôpitaux publics de la ville et des Bouches-du-Rhône réunies pour les cinq prochaines années. De même, des dizaines d'hôpitaux publics qui refusaient la fermeture de leur maternité et de leur chirurgie ont vu leurs projets de modernisation refusés.
Et puis Bachelot ose affirmer : « En France nous avons beaucoup de lits non-occupés en court séjour » pour conclure que « le texte que j'ai élaboré... et que je défendrai en janvier ou février devant le Parlement, doit permettre de repenser l'hôpital en terme de territoire pour garantir la qualité des soins, leur accès pour tous... » Mais l'immense majorité des hôpitaux, au travers des règles comptables fabriquées à cet effet, sont à l'heure actuelle en déficit virtuel, sommés par la ministre de mettre sur pied des plans de retour à l'équilibre comportant d'abord des fermetures de lits avec des suppressions massives d'emplois d'infirmières, d'ouvriers et d'administratifs, voire de médecins. Au total, dans tout le pays, on peut estimer à quelque vingt mille postes les suppressions d'emplois réclamées sur ce seul chapitre dans les hôpitaux publics.
En fait, on assiste en ce moment à la mise en place d'une destruction massive de tout le tissu existant des hôpitaux publics, avec des conséquences dramatiques à venir. S'il y a une urgence pour défendre la santé publique, c'est de combattre avec la dernière énergie cette politique indigne et criminelle.