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- Lutte ouvrière n°2102
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Île de la Réunion - Exonérations de cotisations, défiscalisation : Les patrons des DOM pleurent la bouche pleine
À l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2009, le gouvernement dit vouloir quelque peu écorner certains des avantages dont bénéficient les patrons des départements d'outre-mer (en particulier les plus grands), et ceux qui investiraient dans ces régions.
Jusqu'à présent, l'État fait chaque année plus d'un milliard d'euros de cadeaux au patronat des départements d'outre-mer, sous forme de diverses exonérations de cotisations sociales. À cela s'ajoute, pour eux ou pour tout autre investisseur de métropole, la possibilité d'échapper à l'impôt en plaçant leur argent dans l'immobilier ou les PME ultramarines. À un journaliste qui demandait à Yves Jégo, le ministre de l'Outre-mer, quelle était selon lui l'efficacité de la politique de défiscalisation, celui-ci a répondu que, pour 780 millions d'euros de défiscalisation dans les DOM, deux milliards d'euros d'investissements avaient été réalisés. Autant dire que près de la moitié de ces investissements ont été remboursés par l'État, via cette défiscalisation.
Le gouvernement entendrait limiter ces deux dispositions en instaurant une dégressivité sur les exonérations de cotisations patronales et un plafonnement à 40 000 euros par foyer des sommes pouvant être défiscalisées.
Ces mesures ne mettraient évidemment pas le patronat sur la paille, mais elles ont créé un grand émoi chez les patrons de la Réunion, qui se sont mobilisés à plusieurs reprises.
Ceux du BTP, par exemple, ont utilisé le chantage : si le gouvernement persistait dans cette voie, disaient-ils, il y aurait des fermetures d'entreprises et le licenciement de 5 000 à 6 000 ouvriers. Le patronat du BTP a empoché, des années durant, les bénéfices des exonérations et autres défiscalisations en construisant dans le secteur du logement privé, afin de vendre à ceux qui avaient les moyens d'acheter. Aujourd'hui que le gouvernement prétend vouloir réorienter la défiscalisation vers la construction de logements sociaux, les patrons font grise mine puisque les profits escomptés seraient moindres. Un de leurs porte-parole, dirigeant d'un groupe sucrier, a même demandé qu'avant de se lancer dans la construction du moindre HLM ou LTS (logement très social), les patrons aient la garantie que les salaires soient entièrement exonérés de cotisations patronales, jusqu'à 2,5 fois le smic.
Les patrons des DOM seront-ils entendus au Parlement ou à Matignon ? En tout cas, ils l'ont déjà été par le Conseil général et régional de la Réunion où, au nom de " l'unité des Réunionnais ", la droite et la gauche soutiennent les exigences patronales. Que des dirigeants de partis comme le Parti Communiste Réunionnais, par la voix de Vergès, ou encore des syndicats de salariés puissent tenir un discours analogue à celui des patrons, ce n'est pas défendre les travailleurs qu'ils prétendent représenter. Amener les travailleurs à se mettre à la remorque des patrons, ce serait les mener à l'impasse et tourner le dos aux intérêts de la population laborieuse.