Après un compromis conclu cet été sur le prix du lait payé aux éleveurs, la « guerre du lait » a repris entre les producteurs et les industriels de ce secteur. Les agriculteurs refusent la diminution de 4 à 7 centimes par litre de lait que voudraient leur imposer les industriels pour le quatrième trimestre 2008. D'autant que ces derniers proposent de porter cette baisse à 10, voire 12 centimes, au 1er trimestre 2009.

En réponse, plusieurs sites industriels ont été bloqués par les producteurs. En Haute-Saône, les producteurs ont bloqué une usine du groupe fromager Entremont Alliance. Dans la Loire, ce sont près de 200 éleveurs qui ont bloqué une laiterie Lactalis et une fromagerie. En Isère, une usine Danone et une usine Sodial (ex-Candia) ont fait les frais de leur colère. Les producteurs ont également manifesté en Bretagne, en Normandie ainsi que dans le Sud-Ouest.

Jusqu'en mai dernier, le prix payé aux éleveurs résultait d'un accord entre les représentants des producteurs et les représentants des industriels, mais cette pratique a été dénoncée par la Direction générale de la concurrence, du commerce et de la répression des fraudes, qui lui reprochait de ne pas laisser jouer la concurrence. Fort de cela, le groupe fromager Entremont Alliance avait dès cet été tenté de faire baisser les prix, avant de reculer devant le blocage de ses usines par les producteurs.

Aujourd'hui, Entremont, Lactalis, Danone, Nestlé et les autres grands groupes de la filière reviennent à la charge, provoquant une nouvelle colère des producteurs. D'autant que, si le prix du lait a progressé d'environ 21 % en 2008, il n'a fait que retrouver son niveau de 2001, après avoir baissé régulièrement entre 2001 et 2006. Cette diminution de leurs revenus avait d'ailleurs poussé des dizaines de milliers de producteurs à abandonner cette activité.

La baisse des prix que voudraient leur imposer aujourd'hui les industriels se traduirait par un important recul des revenus des producteurs. Selon une étude menée dans les Côtes-d'Armor, le revenu annuel moyen des producteurs de lait atteint 15 000 à 16 000 euros pour une production moyenne de 200 000 litres, soit quelque 4 000 euros par trimestre. La baisse des prix proposée par les industriels pour le quatrième trimestre 2008 - de 40 à 70 euros pour 1000 litres - entraînerait un manque à gagner d'au moins 2 000 euros sur cette période, soit une perte équivalant à la moitié du revenu moyen des éleveurs. La volonté des trusts agro-alimentaires est d'autant plus inacceptable que les charges des exploitations (aliments pour le bétail, engrais, énergie et carburant) ont progressé d'environ 20 % sur un an.

Les producteurs ont donc bien raison de se défendre, d'autant que les industriels n'ont jamais répercuté les baisses de coût de leur matière première sur les prix proposés aux consommateurs.