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- Lutte ouvrière n°2098
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Editorial
Ils cherchent à sauver la finance, il faut l'exproprier
Le gouvernement français, qui affirmait il y a peu que les caisses sont vides et qui se répandait en jérémiades sur les 10 milliards de déficit de la Sécurité sociale, a trouvé d'un seul coup 360 milliards pour venir au secours des banquiers !
Les quinze États de la zone euro, réunis le 12 octobre, se sont tous engagés à mettre des sommes fantastiques à la disposition des banques et des institutions financières.
Ainsi donc, comme ces messieurs les banquiers ne se font mutuellement pas confiance et refusent de se prêter de l'argent, l'État se substituera à celui qui serait défaillant. Même dans ses rêves les plus fous, un citoyen ordinaire, en mal de payer les traites de son logement ou de sa voiture, n'oserait imaginer que, s'il était incapable de rembourser sa dette, l'État se substituerait à lui pour la payer. Mais dans leur économie folle, où on poursuit en justice une mère de famille si elle émet un chèque sans provision, non seulement on ne punit pas les responsables du gâchis financier, mais au contraire on les dédommage de leurs pertes pour qu'ils puissent recommencer, l'âme en paix et le coffre-fort plein ! Ces cadeaux, c'est aux classes populaires et surtout aux travailleurs qu'ils les feront payer.
Mais les travailleurs ont déjà payé, par avance, pour cette crise financière qui a vu des centaines de milliards partir en fumée. Depuis des années, on bloque les salaires, on remplace les CDI par des contrats précaires, on supprime des emplois pour faire faire plus de travail par moins de travailleurs, on augmente les cadences sur les chaînes comme aux caisses des hypermarchés. Tout cela, pour accumuler du profit. Et voilà que tous ces profits issus du travail, de la sueur et de l'exploitation de tant d'hommes, non seulement n'ont été en rien utiles à la société mais l'ont poussée à la catastrophe financière.
Devant l'ampleur de cette catastrophe, les dirigeants politiques ont l'aplomb de parler de solidarité nationale. Et bien sûr le Parti Socialiste dans l'opposition, tout en minaudant un peu, ne conteste pas le plan Sarkozy, mais seulement certaines de ses modalités. Ses députés se sont simplement abstenus. Les dirigeants des grands partis de gauche, comme ceux de la droite, sont des serviteurs de ces financiers et de ces exploiteurs qui poussent l'économie à la ruine. Les uns comme les autres se démenaient pour privatiser à qui mieux mieux lorsque les banques amassaient du profit et que la Bourse s'envolait. Et maintenant que les banques sont au bord de la faillite et que la Bourse s'effondre, les uns comme les autres en appellent à l'intervention de l'État pour sauver les actionnaires, quitte à nationaliser leurs banques, totalement ou partiellement.
Il fut un temps où la gauche réformiste nous expliquait que les nationalisations, c'était presque du socialisme. Aujourd'hui, Bush, Brown ou Sarkozy ne se donnent pas la peine de dissimuler que c'est pour sauver le capitalisme en général et les capitaux des actionnaires en particulier. Alors, nationaliser les banques ? Oui, mais sans rachat ! C'est-à-dire les exproprier. Il n'y a pas de raison que la société paye les voleurs qui l'ont dépouillée !
Les sommes faramineuses débloquées pour les banquiers ont fait remonter sur-le-champ les cours de la Bourse. Est-ce le signe que la crise financière est enrayée ? Ce n'est même pas sûr car, après la spéculation à la hausse qui a amené les finances à l'état où elles sont, il y a aujourd'hui une spéculation à la baisse qui peut aussi rapporter gros. Et la menace de faillite d'une banque arrange au moins les affaires du concurrent qui la convoite pour la racheter pas cher.
Après deux jours de rebonds de la Bourse, permettant aux spéculateurs d'enca isser leurs bénéfices, le prix des actions s'est en tout cas remis à la baisse. Jusqu'à quand ? Personne ne le sait. Ce que l'on sait en revanche, c'est que la crise ne touche pas seulement les banques et le système financier mais aussi les entreprises de production. Ce qui se traduira, et se traduit déjà, par de nouveaux contingents de licenciés, par une aggravation du chômage et l'accroissement de la pauvreté.
Quand bien même la crise financière serait enrayée, elle constitue déjà un gâchis colossal. Au lieu d'accumuler du profit, il aurait été plus utile de préserver les emplois et d'augmenter les salaires. Quant à l'argent gaspillé par l'État dans des plans de sauvetage, il devrait servir à renforcer les systèmes de protection sociale au lieu de les démolir ; à développer les services publics au lieu de les affaiblir ; à augmenter les retraites au lieu de les diminuer.
L'économie capitaliste, basée sur l'exploitation, le marché et la course au profit, conduit l'humanité au désastre. La seule perspective qui représente un espoir pour l'humanité n'est certainement pas de tenter de réformer un système qui ne peut pas l'être. Il faut y mettre fin en expropriant les capitaux privés, afin que l'humanité puisse produire de façon rationnelle et démocratique en fonction de ses besoins, et pas en fonction des profits d'une minorité !