La loi Aubry : Histoire d'une loi très favorable au patronat21/05/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/05/une2077.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La loi Aubry : Histoire d'une loi très favorable au patronat

Le 13 juin 1998 était adoptée la loi " d'orientation et d'incitation à la réduction du temps de travail ", dite loi Aubry 1, du nom de la ministre socialiste duTravail d'alors, Martine Aubry. Elle reprenait en partie des dispositions de la loi de Robien de 1996, adoptée par le gouvernement de droite de Balladur, qui ouvrait la possibilité de négocier dans les entreprises un accord de réduction du temps de travail, en échange d'allégement des cotisations sociales. Elle fut suivie d'une loi Aubry 2, promulguée le 19 janvier 2000, qui établit la durée légale du travail à 35 heures hebdomadaires, ou à son équivalent légalement établi à 1 600 heures de travail par an.

Cette loi a permis bien sûr à certaines catégories de travailleurs de bénéficier de jours de congés supplémentaires. Mais pour d'autres, les travailleurs en production en particulier, cela a signifié de toute façon plus de fatigue, car les patrons n'ont pas embauché, contrairement à l'objectif affiché par Aubry. Ils leur ont imposé de faire le même travail, en moins de temps, en augmentant les cadences.

Mais si la loi Aubry a abaissé la durée légale du travail, elle a laissé aux patrons la possibilité de recourir aux heures supplémentaires, et surtout elle a introduit la notion de " temps de travail effectif ". Cette notion réduisait singulièrement la portée de la réduction du temps de travail puisqu'elle permettait aux employeurs de ne plus y inclure les temps de pause ou de casse-croûte, ou encore les temps d'habillage et de déshabillage.

La loi Aubry permit également au patronat de généraliser la pratique de l'annualisation du temps de travail, puisque ces 35 heures hebdomadaire pouvaient être calculées à l'année, devenant alors 1 600 heures dans l'année avec des maxima possibles de dix heures par jour et de 48 heures par semaine (44 heures sur douze semaines consécutives). Et tout cela sans que les heures alors effectuées au-delà des 35 heures par semaine soient considérées comme des heures supplémentaires et donnent lieu à des majorations de salaire.

Par ailleurs, la mise en place de ces " 35 heures " devait être discutée entreprise par entreprise avec les syndicats, laissant ainsi les travailleurs d'une entreprise seuls face à leur patron. Le plus souvent des clauses de " modération salariale " ou de gel des salaires s'introduisirent très légalement dans les accords signés.

Outre la mise en place de cette flexibilité du travail dont les patrons rêvaient depuis longtemps, le gouvernement ouvrit le tiroir-caisse. Des aides de l'État aux entreprises furent prévues, officiellement pour leur permettre de faire face au surcoût entraîné par la réduction du temps de travail. Ce cadeau, qui s'ajoutait à une liste déjà longue, consista en une aide forfaitaire d'environ 600 euros par emploi rémunéré et en un allégement sur les bas salaires. Ces dispositions d'exonération prévues pour cinq ans par Aubry furent ensuite regroupées en 2003 par Fillon en un " allégement unique " pour tous les salaires compris entre le smic et 1,6 fois le smic. Les allégements " Aubry " coûtèrent la bagatelle de dix milliards d'euros par an, somme passant une fois de plus des caisses de l'État dans celles des patrons.

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