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Leur société
Finances : Les niches fiscales sont bien gardées
Pour collecter un peu plus d'impôts et réduire ainsi le déficit de l'État, la ministre des Finances, Christine Lagarde, annonce qu'elle va s'attaquer aux " niches fiscales ", " niche après niche " s'il le faut.
Une niche fiscale, c'est une réduction d'impôt sur le revenu qui ne s'applique que suivant certains critères. Ainsi un particulier peut voir ses impôts réduits par " abattement spécial sur les plus values réalisées lors de la cession d'un cheval de course ", parce qu'il finance la " pêche artisanale " (cela serait le cas de 400 personnes, pour une déduction moyenne de 25 000 euros), grâce à " l'exonération des droits de mutation par décès portant sur des droits immobiliers en Corse ", parce qu'il vit des " bénéfices issus de la culture de la truffe " etc. Il y en aurait 400 comme cela pour un manque à gagner de 50 milliards d'euros annuels pour le Trésor public. Toutes ces déductions destinées à une clientèle particulière par des députés attentionnés, porte-parole effectifs de leurs mandants, ont été proposées et votées un jour ou l'autre par le Parlement. Comme le dit Christine Lagarde, " des niches fiscales, tout le monde en a voté ".
Mais il y en a de beaucoup plus générales que d'autres. Toutes les familles aisées peuvent ainsi déduire de leurs impôts tout ou partie du salaire de leur personnel de maison, de l'achat de leur yacht ou de leur marina pour peu que ceux-ci se trouvent dans les DOM TOM, de l'achat, de l'entretien ou de la rénovation de leur résidence si elle est classée monument historique ou patrimoine culturel, de l'entretien de leur jardin s'il est en zone de sauvegarde, de l'achat ou de la restauration d'oeuvres d'art et, bien évidemment, de leurs dons aux oeuvres charitables et aux " fondations " que les plus riches créent éventuellement eux-mêmes. En cumulant plusieurs possibilités de réductions d'impôts, en ayant recours à un conseiller financier, on peut même gagner beaucoup d'argent et ne payer aucun impôt !
Christine Lagarde n'est ni la première ministre des Finances à promettre de s'en prendre aux niches fiscales, ni la première à en avoir fait voter. À commencer par le bouclier fiscal voté en juillet dernier, partie d'un dispositif d'aide aux familles riches qui a coûté 15 milliards d'euros à l'État. Mais entre ce dont elle parle aujourd'hui, ce qu'elle proposera demain si tout cela aboutit à un projet de loi et ce qu'en laisseront les parlementaires si sensibles aux intérêts de certains de leurs électeurs, il y a une grande marge.
Car, comme cela se dit paraît-il dans les services des impôts, derrière chaque niche, il y a un chien de garde. Si celui des truffiers et des pêcheurs artisanaux n'est sans doute pas très féroce, celui des éleveurs de chevaux de course a les dents plus longues. Et pour s'en prendre aux niches qui concernent toute la bourgeoisie, grande, moyenne et petite, particulièrement toutes celles qui touchent à la propriété immobilière et " culturelle ", il faudrait affronter toute la meute...à supposer même que Lagarde en ait la moindre envie.