Ce n'est pas au chômage, mais aux chômeurs, que Sarkozy-Fillon s'attaquent.23/04/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/04/une2073.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Ce n'est pas au chômage, mais aux chômeurs, que Sarkozy-Fillon s'attaquent.

Le gouvernement est en train de préparer des mesures destinées, affirme-t-il, à lutter contre le chômage. Parmi celles-ci, il y a la menace de radiation de tout chômeur refusant deux « propositions valables », et le ministère du Travail a précisé qu'il considère comme « valable » une proposition d'emploi qui n'oblige pas à plus de deux heures de trajet par jour et qui assure un salaire qui ne soit pas inférieur à 70 % du salaire précédent. Mais le trajet ne se mesure pas seulement en temps. Il se mesure aussi en argent. Là où il y a des transports en commun utilisables, deux heures de trajet c'est le sort commun de bien des salariés. Mais là où il n'y en pas, là où il faut utiliser son véhicule personnel, au prix actuel du carburant, cela peut représenter un budget de plusieurs centaines d'euros par mois, auquel il faudrait faire face avec un salaire qui pourrait être amputé de 30 %. On se moque du monde en considérant que ce serait là des « propositions valables » !

La deuxième mesure envisagée, c'est la suppression des dispenses de recherche d'emploi qui concernaient les salariés de plus de 57 ans et demi. Un emploi, ils n'en retrouveront pas pour autant, évidemment. Sauf s'ils acceptent des salaires ridicules, car s'il y a tant de chômeurs dans cette catégorie d'âge, c'est parce que les patrons estiment que les salariés les plus âgés leur coûtent trop cher, ou qu'ils sont trop usés par l'exploitation.

Sarkozy et Fillon savent très bien que ces mesures ne changeront rien à la réalité sociale du chômage. Mais la lutte contre le chômage n'est pas leur problème. Ce qu'ils veulent, c'est flatter les préjugés de leur électorat réactionnaire, de tous ces bourgeois, grands ou petits, qui pensent que par définition tous les travailleurs sont des fainéants, et tous les chômeurs des parasites qui vivent aux crochets de la société. Ce qu'ils veulent, c'est aussi offrir au patronat une main-d'oeuvre contrainte d'accepter des salaires, des conditions de vie et de travail misérables.

Le chômage n'est un drame que pour les travailleurs. Pour ceux qu'il frappe directement, bien sûr. Mais aussi pour l'ensemble du monde du travail, car aucun salarié ne peut penser qu'il est à l'abri d'un licenciement, et tous le paient par le chantage sur les salaires que le chômage permet au patronat d'exercer.

Mais pour le patronat, c'est au contraire pain bénit. C'est sa responsabilité si le chômage existe, car la quantité de travail à effectuer n'a pas diminué dans le pays, mais les suppressions d'emplois, les plans de licenciement se sont multipliés. La même production, voire une production supérieure, se fait aujourd'hui avec bien moins de salariés. Et ce n'est pas seulement à cause du progrès technique, mais parce que partout, sur les chaînes des usines d'automobile comme dans les sociétés qui utilisent surtout des employés, les charges de travail n'ont pas cessé d'augmenter au fil des années.

On nous dit que c'est à cause de la concurrence internationale. Mais la concurrence internationale n'a pas empêché les entreprises françaises d'afficher d'année en année des profits en hausse constante, les riches de devenir de plus en plus riches, alors que la plus grande partie de la population voit son niveau de vie diminuer.

Ce qui est en cause, c'est l'organisation même de la société, ce système capitaliste, basé sur la seule recherche du profit, dont on voit qu'il condamne des milliards d'hommes de par le monde à la famine, et qui est entré depuis l'été dernier dans une crise dont personne ne peut prédire quelle sera l'issue.

Nos gouvernants ne cessent de nous dire, pour justifier toutes les attaques contre le système des retraites et la Sécurité sociale, qu'il faut penser à ce que nous laisserons aux générations futures. Eh bien, si nous nous soucions des générations futures, du monde que trouveront nos enfants et petits-enfants, c'est précisément le système capitaliste qu'il nous faudra remplacer par une économie se donnant pour but la satisfaction des besoins de tous.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 21 avril.

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