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Dans les entreprises
SNCF : La direction s'en prend au droit de grève
Arrogante et sûre de son fait, la direction SNCF vient d'instaurer le service minimum sans même avoir attendu la table ronde qu'elle avait prévue le 25 janvier avec les organisations syndicales.
Les agents de conduite, les contrôleurs et les aiguilleurs ont chacun reçu une lettre les informant du nouveau dispositif en vigueur en cas de grève. Ils devront dorénavant envoyer à leurs supérieurs une " déclaration individuelle d'intention " au plus tard 48 heures avant le début de leur participation à la grève, sous peine de sanction disciplinaire et de journées de mise à pied.
Il s'agit évidemment d'une atteinte importante au droit de grève puisque cette déclaration d'intention les expose davantage à la pression de leur hiérarchie. Mais surtout, la direction espère par ce biais empêcher le caractère contagieux d'une grève. Dans les mouvements importants, les travailleurs se déterminent surtout par l'écho que rencontre la grève et l'espoir qu'elle suscite. La grève n'est pas individuelle mais c'est un acte collectif, vivant, où les plus déterminés entraînent leurs camarades de travail dans un combat qu'ils ont engagé en premier. C'est tout cela que la direction voudrait aujourd'hui amoindrir.
Autre dispositif, la SNCF prévoit " la réaffectation des personnels disponibles " pour remplacer les grévistes. Ainsi, elle s'autorise à utiliser du personnel d'autres établissements, non concernés par la grève, comme briseurs de grève. La SNCF conseille aussi aux agents de réserve, de repos lors des grèves, de se déclarer grévistes s'ils ne veulent pas être réquisitionnés.
Le gouvernement et la SNCF veulent donc renforcer encore leur arsenal réglementaire pour tenter de réduire la combativité des cheminots. Cela n'a rien à voir avec les intérêts des usagers que la SNCF piétine quotidiennement, supprimant les effectifs, économisant sur l'entretien du matériel et des rames.
Jusqu'à présent, les organisations syndicales ont plutôt fait preuve de discrétion sur ce sujet. Mais la direction aurait tort de croire la partie gagnée. Il faut souhaiter que les cheminots réagissent à la première mise à pied frappant un gréviste. Du coup ce dispositif aura le résultat contraire et déclenchera plus de grèves qu'il n'en supprimera !
Dans l'histoire des luttes ouvrières et cheminotes, aucune menace de sanction, de réquisition et même de révocation pour fait de grève n'a jamais empêché les explosions de colère et la propagation des grèves. Ainsi, lors de la grève des fonctionnaires en août 1953, des milliers de cheminots refusèrent d'être réquisitionnés. Le gouvernement dut retirer ses projets. Mais lorsqu'après la reprise du travail le gouvernement voulut suspendre des conducteurs, la grève reprit de plus belle et il dut annuler ses sanctions. Dix ans plus tard, en 1963, de Gaulle essuya aussi un échec en voulant réquisitionner les mineurs en grève. C'est à cause de l'inefficacité de la réquisition que le gouvernement de l'époque l'abandonna pour instaurer un préavis dans les services publics.
Le gouvernement veut aujourd'hui aller plus loin dans la remise en question du droit de grève et plaire ainsi à son électorat le plus réactionnaire et le plus antiouvrier. Mais le dispositif pourrait bien se refermer sur ses doigts.