La " flexisécurité " : Un cheval de flexibilité pour le patronat, une alouette de sécurité pour les travailleurs18/01/20082008Journal/medias/journalnumero/images/2008/01/une2059.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

La " flexisécurité " : Un cheval de flexibilité pour le patronat, une alouette de sécurité pour les travailleurs

Il semble que l'accord sur la " modernisation du marché du travail ", applaudi par le patronat et son choeur politique et médiatique, sera signé par toutes les confédérations syndicales, sauf la CGT. Il est présenté comme le résultat d'une négociation dans laquelle chacun, représentants des patrons et représentants des travailleurs, aurait concédé quelque chose. On aurait ainsi échangé la " flexibilité " du marché du travail, c'est-à-dire la plus grande facilité à licencier, contre une plus grande " sécurité " pour les salariés.

Mais en matière d'emploi, la seule sécurité pour les travailleurs serait justement que le droit de licencier soit restreint, et même carrément interdit dans les entreprises qui font des profits. Tout ce qui facilite les licenciements augmentant par définition l'insécurité des salariés, les concessions réciproques en la matière n'ont pas de sens.

Outre une nouvelle forme de contrat précaire et l'allongement de la période d'essai, les patrons ont surtout obtenu la " rupture à l'amiable " du contrat de travail. Il s'agit en fait de la possibilité de licencier sans que les travailleurs puissent avoir recours aux Prud'hommes, ou très difficilement. Naturellement, il y faudra l'accord du salarié. Mais ce dernier aura à choisir entre le licenciement avec sa signature et une petite indemnité, ou bien le licenciement sans sa signature et un dossier aux Prud'hommes, toujours long et au résultat incertain. Plus le travailleur sera isolé, l'entreprise petite, le patron pressant, le syndicat et le tribunal de prud'hommes lointains, plus cela ressemblera au droit absolu pour le patron de licencier qui il veut, quand il veut.

En contrepartie, les indemnités de licenciement seraient doublées, a-t-on entendu dire. Mais c'est faux. Aujourd'hui, l'indemnité de licenciement pour " motif personnel " est de 10 % du salaire mensuel pour un travailleur ayant entre deux et dix ans d'ancienneté, majoré d'un quinzième de mois au-delà de dix ans. Elle représente le double, soit 20 % du salaire mensuel par année de présence, plus deux quinzièmes au-delà de dix ans d'ancienneté, dans le cas d'un licenciement économique. Le nouvel accord instaurerait une prime unique égale à la prime touchée actuellement par les travailleurs victimes d'un plan " social " et versée au bout d'un an de présence au lieu de deux. Autrement dit, cela ne change rien dans le cas, extrêmement majoritaire, des licenciements économiques. Quant à un ouvrier payé au smic licencié " individuellement " au bout de dix ans, il partirait avec deux mois de salaire au lieu d'un, pour solde de tout compte. Quelle avancée !

Les salariés licenciés conserveraient quelques mois leur droit à la complémentaire santé... que nombre d'entre d'eux ne peuvent pas se payer alors même qu'ils ont un salaire. Ils conserveraient également leur " droit à la formation ", comme si les chômeurs ne s'épuisaient pas déjà, de stages bidons en formations humiliantes.

Quelques autres mesures sont bien évoquées, comme la meilleure indemnisation des salariés précaires ou bien l'indemnisation des chômeurs de moins de 25 ans, mais leur financement sera " négocié ultérieurement ". Quant à leur application...

Le patronat est donc en train d'obtenir ce qu'il voulait : rendre les travailleurs plus désarmés face à leur employeur, sur le plan légal et individuel. Reste à lui rappeler que, collectivement, ils représentent toujours la même force.

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