Il y a 40 ans, la loi Neuwirth : La reconnaissance du droit à la contraception.27/12/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/12/une2056.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

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Il y a 40 ans, la loi Neuwirth : La reconnaissance du droit à la contraception.

Le 28 décembre 1967, le Parlement, sur proposition du député gaulliste Lucien Neuwirth, votait une loi qui modifiait la législation de 1920. Si l'interruption volontaire de grossesse restait un délit, les articles qui interdisaient toute contraception, et toute propagande anticonceptionnelle, en étaient éliminés.

Jusque-là, les seuls contraceptifs librement vendus sur le marché étaient les préservatifs masculins... au nom de la prévention des maladies vénériennes, mais sans qu'aucune allusion ne puisse être faite à un autre rôle possible.

De la fondation du planning familial...

Les choses avaient commencé à bouger en 1956, quand le docteur Marie-Andrée Lagroua Weill-Hallé et la sociologue Evelyne Sullerot fondèrent une association prudemment dénommée " Maternité heureuse ", qui allait devenir en 1960 le Mouvement français pour le planning familial. Avec un petit groupe de médecins et non-médecins, le Planning familial tentait d'organiser, en jouant à cache-cache avec la loi, une action pour permettre aux femmes l'accès à la contraception et pour éviter du même coup le recours aux avortements clandestins, qui mutilaient ou tuaient chaque année des milliers de femmes, sans soulever dans le monde des hommes politiques d'autres réactions que la réprobation pour ces pratiques qualifiées de criminelles, ou au mieux l'indifférence.

Le planning familial ouvrit des centres de conseil, développa l'information, facilita l'achat de contraceptifs mécaniques féminins, comme les diaphragmes, qu'il fallait importer de Grande-Bretagne, où le Planning existait depuis quarante ans déjà.

Par ailleurs, la pilule contraceptive, mise au point aux États-Unis, était utilisée depuis des années dans certains pays, et pour les laboratoires pharmaceutiques spécialisés dans les produits hormonaux, c'était un marché potentiel fort intéressant.

...au vote de la loi.

Quelques propositions de lois avaient déjà sans succès été déposées, comme en 1954, un projet du groupe parlementaire radical-socialiste. Mais c'est un homme politique de droite qui réussit à faire dépénaliser la contraception.

L'âge à partir duquel celle-ci serait autorisée - 21 ans, comme la majorité légale à l'époque - suscita contre Lucien Neuwirth l'accusation " d'ouvrir les portes à la dépravation de la jeunesse et au relâchement des moeurs du pays ". Puis les détracteurs de sa proposition proposèrent, entre autres, d'avoir recours à deux médecins, l'un contrôlant en quelque sorte l'autre, et de ne pas obliger le pharmacien à vendre la pilule anticonceptionnelle, pour ne pas porter atteinte à sa liberté.

Malgré tout, la loi autorisant la contraception, réservant cependant la publicité sur les méthodes contraceptives aux revues spécialisées, et exigeant une autorisation des parents pour une prescription médicale de contraceptifs oraux avant 21 ans, fut votée. Il n'était toutefois pas question de remboursement par la Sécurité sociale. Les sénateurs inventèrent même la nécessité d'utiliser un carnet à souches, comme pour les stupéfiants, mais ce ne fut pas appliqué.

Un florilège machiste et réactionnaire.

Les débats sur cette loi donnèrent l'occasion aux plus réactionnaires des hommes politiques de faire étalage de leur crasse intellectuelle. " La pilule est destinée, non aux Françaises, car notre pays souffre de sous-population, mais aux femmes des pays où la natalité est le double voire le triple de la nôtre et où la faim sévit ", peut-on lire dans le compte-rendu de séance. Un orateur affirmait que " dans l'esprit du législateur américain, l'usage de la pilule doit être répandu au sein des classes sociales déshéritées - Noirs, indigents, chômeurs - dont la réduction numérique est grandement souhaitée par le gouvernement des États-Unis d'Amérique ". Ou encore : " Les maris ont-ils songé que, désormais, c'est la femme qui détiendra le pouvoir absolu d'avoir ou de ne pas avoir d'enfants en absorbant la pilule, même à leur insu ? Les hommes perdront alors la fière conscience de leur virilité féconde et les femmes ne seront plus qu'un objet de volupté stérile. "

Ce florilège a été rassemblé par l'universitaire féministe Xavière Gauthier, qui le commente ainsi : " Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, les femmes vont décider, elles et elles seules, d'avoir des enfants ou non. Cela peut paraître de simple justice, de simple bon sens. Ce sont elles qui les portent pendant neuf mois à l'intérieur de leur corps, ce sont elles qui en accouchent, ce sont elles qui, éventuellement, les allaitent. C'est à elles de savoir si cela leur convient ou pas. "

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