- Accueil
- Lutte ouvrière n°2054
- Une riposte unie de tous les travailleurs est nécessaire
Editorial
Une riposte unie de tous les travailleurs est nécessaire
Après avoir appelé à une grève de 24 heures pour le mercredi 12 décembre à la RATP et le jeudi 13 à la SNCF, la CGT accompagnée de la CGC ont finalement décidé de renoncer, laissant sans voix bon nombre de cheminots et d'agents des transports publics parisiens. Le fait d'avoir refusé de programmer ces grèves le même jour était déjà incompréhensible, mais lever les préavis devenait tout bonnement ridicule même si cela n'étonnait pas bon nombre de cheminots et d'agents de la RATP, qui n'attendaient rien de bon de ces appels divergents lancés par les directions syndicales. Pour ajouter à la cacophonie, SUD-Rail annonçait qu'il proposerait le dépôt d'un préavis à compter du 18 décembre, la CFTC le 17 au soir ; quant à la CFDT c'est le 20 qu'elle appellerait les cheminots à 59 minutes de grève.
Cette dispersion est dans la suite logique de l'attitude des confédérations syndicales qui ont accepté, alors que les cheminots et les travailleurs de la RATP étaient engagés dans une même lutte pour la défense de leurs régimes de retraite, de négocier entreprise par entreprise, c'est-à-dire de les diviser. Ce n'était vraiment pas dans la ligne du " Tous ensemble " scandé dans toutes les manifestations, et qui appelle à un mouvement de l'ensemble des travailleurs, du public comme du privé.
Ce sont en effet les retraites de tous les travailleurs qui sont attaquées, pas seulement celles des régimes dits " spéciaux ", puisqu'un nouvel allongement du nombre d'annuités nécessaires pour avoir droit à une retraite à taux plein est déjà annoncé pour 2008... et qu'il n'y a aucune raison pour que ça ne continue pas, si les travailleurs n'y mettent pas un coup d'arrêt. En ce qui concerne les retraites, le " travailler plus pour gagner plus " de Sarkozy signifie travailler plus longtemps (si on ne se retrouve pas au chômage avant) pour toucher des retraites de plus en plus faibles.
Tous les travailleurs, qu'ils soient du public ou du privé, ont également les mêmes problèmes de pouvoir d'achat. Et ce ne sont pas les mesures annoncées par le chef de l'État qui les résoudront. Tout ce qu'il a à offrir aux travailleurs, c'est la possibilité (pour ceux qui en bénéficient) de pouvoir toucher plus tôt ce qui leur est dû au titre de la participation, c'est-à-dire de l'argent qu'ils ont déjà gagné. Et c'est de renoncer aux RTT et aux 35 heures - qui leur laissaient un peu de temps pour vivre - à condition que leur patron y trouve son compte et soit d'accord. C'est aussi de sacrifier leurs dimanches si leurs patrons le veulent. Mais alors que toutes les grandes entreprises affichent des bénéfices insolents, le gouvernement n'envisage absolument pas d'augmenter les salaires (pas même le smic qui relève de sa compétence immédiate), les pensions et les retraites.
La France serait pauvre, elle serait même " en faillite " a déclaré il y a peu le Premier ministre, qui prétend qu'il serait impossible de satisfaire les revendications des classes populaires. Mais c'est un mensonge éhonté, car " la France ", c'est d'un côté une petite minorité de privilégiés dont la fortune ne cesse de s'accroître et, de l'autre, les millions de travailleurs et de retraités qui vivent de plus en plus mal, l'appauvrissement des uns étant la conséquence de l'enrichissement spectaculaire des autres. Dans cette situation où le grand patronat, avec l'aide de l'État, profite de la crainte du chômage pour s'en prendre aux conditions de vie et de travail de la population laborieuse, la préoccupation d'organisations syndicales vraiment soucieuses de la défense des intérêts des travailleurs, serait d'oeuvrer à unifier les luttes de ceux-ci, à préparer une contre-offensive d'ensemble du monde du travail. La dispersion des appels lancés par les directions syndicales, les reculades sans raisons, ne vont évidemment pas dans ce sens-là. Mais en novembre, les cheminots et les agents de la RATP ont su faire la jonction entre leur lutte et celle des fonctionnaires en poursuivant leur grève jusqu'à celle de la Fonction publique, et au-delà. Car indépendamment de ce que veulent les confédérations syndicales, les travailleurs les plus combatifs ont un rôle à jouer pour redonner au monde du travail confiance dans sa force, dans sa capacité à changer le cours des choses.
C'est sur cette capacité des travailleurs à aller au-delà de ce que proposent les directions syndicales qu il faudra compter à l'avenir et non sur l'absence de volonté affichée par ces dernières, qui s'ingénient à diviser les mouvements alors qu il faudrait au contraire les unifier.