Turquie : Grève victorieuse à Türk Telekom13/12/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/12/une2054.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Turquie : Grève victorieuse à Türk Telekom

Jeudi 29 novembre, après une grève de 44 jours, les 25 600 travailleurs de la société de télécommunications Türk Telekom ont obtenu la plupart de leurs revendications.

Début 2005, Türk Telekom a été privatisé. La société acquéreuse, officiellement la société Oger, appartient à la famille libanaise Hariri, elle-même associée à des capitaux d'Arabie saoudite. Le nouveau patron n'a pas attendu longtemps pour passer à l'offensive contre les travailleurs. Presque 10 000 d'entre eux ont été transférés à des sociétés sous-traitantes, perdant la plupart des garanties.

À la suite de cela les statuts et les salaires ont changé, multipliant les divisions entre les différentes catégories et à l'intérieur d'une même catégorie. Le patron a poussé les travailleurs à se désinscrire du syndicat, qui fonctionne en Turquie selon le système américain et doit représenter plus de 50 % du personnel pour être reconnu. Au passage un salaire de 1 400 livres turques (820 euros) était accordé à ceux qui acceptaient de quitter le syndicat, alors que le montant standard des salaires était de 800 livres (470 euros).

La direction du syndicat a dû appeler à la grève, réclamant l'arrêt de ce processus de désyndicalisation et des discriminations salariales et l'annulation des nouvelles mesures de flexibilité. Une grande campagne de presse a alors commencé contre ce mouvement, affirmant même que les téléphones des ministres seraient coupés ou que les chaînes de télévision cesseraient d'émettre.

Les travailleurs n'en ont pas moins arrêté le travail durant 44 jours à partir de la mi-octobre. Les 10 000 employés désormais rattachés aux sociétés sous-traitantes, eux, n'avaient pas le droit de se joindre à la grève et ont donc continué le travail, réparant par exemple les pannes. Durant tout ce temps, la presse et la police ont exercé des pressions. Ce sont d'abord 42 travailleurs et syndicalistes qui ont été arrêtés, puis ensuite 12, puis encore 7 dans différentes villes comme Istanbul, Diyarbakir, Tunceli, sous l'accusation de sabotage ; 4 autres ont été licenciés.

Malgré l'attitude passive des dirigeants syndicaux, qui n'avaient pas vraiment préparé les travailleurs à la grève, ceux-ci se sont mobilisés pour la défendre, alors que tous les jours les chaînes de télévision les accusaient de sabotage. Les conséquences de la grève ont commencé à se faire sentir. Finalement, une société sous-traitante ayant arraché accidentellement les câbles de fibres optiques qui alimentaient la Bourse, celle-ci a été paralysée pendant une journée entière. Décidément, l'affaire devenait grave !

Il a fallu cette perturbation de la Bourse pour que le gouvernement intervienne, faisant pression sur le patron pour qu'il accepte la plupart des revendications des grévistes. D'après les accords signés, les travailleurs ont obtenu 10 % d'augmentation pour la première année et 6,5 % pour la deuxième année. Fait plus important, le patron a accepté de mettre fin aux discriminations salariales, accepté que tous les travailleurs, et même les futurs embauchés, gardent leur affiliation syndicale. Il a également accepté de réintégrer les travailleurs licenciés et de verser à tous une prime exceptionnelle de 200 livres (117 euros).

L'accord a été signé par le syndicat sans consulter les travailleurs, mais la grève n'en reste pas moins un succès pour les grévistes. Tant pis pour le patron, pour sa bourse et même pour la Bourse.

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