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Dans le monde
Tunisie - Ben Ali : Vingt ans de dictature.
En Tunisie, le 7 novembre 2007 a marqué le vingtième anniversaire du régime dictatorial du général-président Ben Ali.
En effet c'est le 7 novembre 1987 que le général Zine el-Abidine Ben Ali s'empara du pouvoir. Il avait déjà derrière lui une carrière édifiante : formation par les services de renseignement américains, chef de la Sûreté (et à ce titre responsable de la répression des grèves de 1978 au cours de laquelle des centaines de manifestants trouvèrent la mort), ministre de l'Intérieur, puis Premier ministre de Bourguiba.
Son coup d'État fut réalisé en douceur. Ben Ali s'était arrangé pour que Bourguiba, au pouvoir depuis l'indépendance et devenu sénile, soit déclaré inapte à l'exercice du pouvoir par des médecins complaisants, ce qui plaçait le Premier ministre en situation d'assumer l'intérim. Ce changement fut bien accueilli par la grande masse des Tunisiens, d'autant que le nouveau régime se voulait le chantre de " la démocratisation du pays ". Effectivement, dans les mois qui suivirent, des centaines de prisonniers politiques furent remis en liberté.
Cependant l'illusion ne devait durer que deux ans. Ben Ali commença par verrouiller les élections de 1989 ; la fraude organisée assura son élection au poste de président de la République avec 99,20 % des suffrages - un score auquel il s'est abonné dans toutes les élections qui se sont déroulées depuis. Puis, prétextant vouloir mettre ce pays de tradition laïque, où les femmes jouissaient depuis 1957 de droits et de libertés comme dans aucun autre pays arabe, à l'abri des intégristes islamiques qui commençaient à se manifester, il fit donner sa police : des milliers de suspects furent arrêtés, des dizaines furent torturés à mort, beaucoup d'autres durent s'exiler.
La " menace intégriste " écartée, la répression se retourna contre tous ceux qui critiquaient le pouvoir ou tout simplement affichaient leur indépendance.
Depuis, tandis que Ben Ali a poussé au plus haut point le culte de la personnalité et que son clan s'est enrichi en puisant dans les caisses des entreprises publiques et en organisant toutes sortes de trafics, la police et les services de renseignement sont devenus omniprésents, la presse a été asservie, la torture institutionnalisée, les opposants harcelés, les organisations ouvrières muselées.
Ainsi, depuis avril 2006, la police empêche toute personne d'avoir accès aux locaux de la Ligue tunisienne des droits de l'homme. De même, les autorités ont fermé des locaux régionaux de l'Union générale tunisienne du travail (UGTT), que des associations indépendantes du pouvoir utilisaient pour se réunir. Plus récemment, en juin 2007, la police a saccagé les bureaux du Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT). Et on ne compte plus les avocats, les journalistes, les militants ouvriers qui sont harcelés, traînés en justice et emprisonnés.
Cela n'empêche pas que le régime de Ben Ali soit soutenu par les représentants de pays dits démocratiques, comme l'administration Bush et le gouvernement français. Il est vrai qu'en ce qui concerne la France, près d'un millier de sociétés opèrent en Tunisie ; les profits qu'elles amassent en exploitant une main-d'oeuvre peu payée expliquent sans doute le silence qui entoure les exactions de ce régime.