Pakistan : Benazir Bhutto fera-t-elle illusion ?25/10/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/10/une2047.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Pakistan : Benazir Bhutto fera-t-elle illusion ?

Le 18 octobre, à Karachi, l'attentat contre Benazir Bhutto a tué 136 des centaines de milliers de personnes qui étaient venues l'accueillir. La responsabilité de l'attentat incombe certainement à une bande armée, mais laquelle ?

De tels groupes sont en effet très nombreux au Pakistan. Il y a les groupes tribaux, les islamistes, les trafiquants de drogue, les gangsters des villes... les uns et les autres pouvant d'ailleurs se confondre. Il y a surtout l'armée pakistanaise, au pouvoir de fait depuis toujours, consommant 40 % du budget de l'État et qui est elle-même l'entrepreneur le plus riche et le plus grand propriétaire foncier. Principal foyer de corruption du pays, l'armée organise le trafic d'armes, et le trafic d'héroïne ne peut pas se faire sans son accord. Les militaires et les petites bandes qui les concurrencent dans certaines zones vivent ainsi aux dépens des 160 millions de Pakistanais plongés dans la misère et l'ignorance et soumis à la violence quotidienne.

Cet état de fait n'a pu perdurer que grâce à l'impérialisme américain, qui a financé et équipé l'armée pakistanaise, meilleur soutien des États-Unis dans la région.

Le pourrissement de l'État a été accéléré par l'intervention américaine dans l'Afghanistan voisin et le soutien que les États-unis ont exigé de l'État pakistanais. Moucharraf, le général-président pakistanais, ne peut rien refuser à son protecteur et bailleur de fonds. Mais, à se mettre directement et visiblement au service de l'impérialisme américain, il a perdu le peu de légitimité qu'il pouvait avoir.

Il semble que les États-Unis eux-mêmes aient jugé que le pouvoir de Moucharraf était désormais trop fragile et lui aient demandé de faire appel à Benazir Bhutto, ancien Premier ministre, écartée en 1999 et qui conserve encore un certain crédit.

En plus d'immenses propriétés, Benazir Bhutto avait hérité du Parti du Peuple Pakistanais fondé par son père, Ali Bhutto. Ce dernier, Premier ministre depuis1973, fut destitué et pendu par les militaires en 1979. Sa fille bénéficia ensuite de son prestige lorsqu'elle exerça le pouvoir de 1988 à 1990, puis de 1993 à 1999. Cependant ses passages au pouvoir, outre l'enrichissement éhonté de sa famille par la corruption, amena surtout la désillusion de ses partisans. C'est pourtant sur elle que les États-Unis comptent pour tenter de " stabiliser " la situation, en donnant au visage militaire de l'allié pakistanais un aspect plus démocratique.

Il n'est pas encore dit que cette opération politique aboutisse, comme le montre l'attentat du 18 octobre. Mais si c'est le cas, cela ne pourra guère abuser que l'opinion publique occidentale, et encore pas pour très longtemps. Quant à la population pakistanaise, elle continuera à subir la loi des gangsters, des usiniers, des propriétaires fonciers, des militaires et, au-dessus d'eux, de l'impérialisme américain.

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