EADS : Pas de capitalisme sans " délit d'initié ".10/10/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/10/une2045.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

EADS : Pas de capitalisme sans " délit d'initié ".

Si leur culpabilité devait se confirmer, " les dirigeants d'EADS seraient tout sauf des patrons ", a lancé Laurence Parisot. Si l'on prenait au sérieux ces propos, il ne resterait plus grand monde autour d'elle dans le patronat français. Le fait d'utiliser une information qui n'a pas encore été divulguée pour faire du profit en Bourse, ce que l'on appelle le " délit d'initié ", loin d'être une exception, est en effet un des fondements de l'activité boursière. C'est seulement dans les contes de fées et dans certains manuels d'économie que tout le monde serait égal devant l'information, chacun agissant uniquement selon son intuition et son flair.

Sans même remonter jusqu'au scandale du canal de Panama, où financiers et entrepreneurs étaient les seuls à savoir que les travaux n'avançaient que sur le papier, et dont la faillite en 1889 laissa sur la paille près de cent mille petits souscripteurs, ce genre d'affaire a ponctué toute l'histoire du capitalisme. Dans les dernières décennies, on peut citer l'affaire Péchiney. Des amis de Mitterrand, au courant du rachat de la société américaine Triangle par Péchiney, avaient racheté des paquets d'actions avant que les cours ne commencent à grimper. Il y eut aussi celle de la Société Générale. Des financiers et des proches du gouvernement, informés d'un raid boursier sur cette banque, avaient pu spéculer à la hausse. En 1999, ce furent quelques banquiers et journalistes, ayant acquis des actions Promodès juste avant son rachat par Carrefour, de se retrouver sur la sellette. Et la liste n'est pas close... Ces quelques scandales ne constituent que la partie émergée de l'iceberg. À la Bourse de Paris, les cours des sociétés qui vont être rachetées commencent souvent à grimper avant toute annonce officielle. Ce sont les " initiés " qui font acquérir des actions par leurs amis ou par l'intermédiaire de sociétés basées dans des paradis fiscaux opaques. Et l'Autorité des marchés financier, censée contrôler tous ces trafics, n'a ni les moyens ni même la volonté de s'opposer à ce qui n'est que le fonctionnement naturel des Bourses.

Mais le vrai problème, c'est que derrière ces escroqueries mêlant en un cocktail aux proportions variables banquiers, hommes politiques et leurs petits copains, il y a bien souvent des usines qui ferment, des licenciements, des familles réduites à la misère. Car au bout du compte, si les travailleurs sont dans l'ignorance, c'est toujours à eux que l'on demande de régler l'addition. C'est bien pourquoi il serait urgent qu'un contrôle soit exercé par la population laborieuse, et non par de soi-disant " gendarmes de la Bourse ", sur les opérations des grandes entreprises qui se font non seulement à l'abri des regards, mais contre les salariés et contre les intérêts de la collectivité.

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