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Brésil : Campagne pour la renationalisation d'un géant de l'extraction minière
Du 1er au 9 septembre, pendant les commémorations de l'indépendance du pays en 1822, les Brésiliens vont pouvoir se prononcer pour ou contre la renationalisation de la Compagnie Vale do Rio Doce. Une consultation est en effet organisée par un collectif qui réunit le Mouvement des Sans-Terre et une soixantaine de syndicats, d'organisations liées à l'Église catholique, de mouvements populaires et de partis d'extrême gauche.
La consultation porte en fait sur quatre questions : le maintien de la privatisation de la Vale, le paiement de la dette au détriment de la population, le maintien du secteur électrique aux mains du privé, qui facture le kilowatt jusqu'à huit fois plus cher à l'usager qu'aux grandes entreprises, et la réforme annoncée contre les droits des travailleurs, et en particulier des retraités. Déjà en 2000, lors d'une consultation semblable, six millions de personnes s'étaient prononcées contre le paiement de la dette publique, et en 2002 dix millions contre l'Alca, l'Accord de libre commerce des Amériques sous l'égide des États-Unis.
Néanmoins c'est la Vale qui est en vedette. Ce géant de l'extraction minière regroupe plus de 60 entreprises dans une vingtaine de pays. Le groupe, anglais au départ, a été racheté par l'État brésilien en 1942. Avec 16 % de la production mondiale, c'est le premier producteur et exportateur de minerai de fer, mais il extrait aussi cuivre, manganèse, or, potasse, bauxite, nickel, étain, titane, etc. C'est un exploiteur féroce. Chacun de ses 52 000 salariés lui rapporte vingt fois son salaire en bénéfice net. Il ne verse que 2 % de royalties aux régions où il exerce. Il est poursuivi par l'inspection du travail de l'État du Para, où se trouve la mine géante de Carajas, pour plus de 8 000 infractions, en particulier les horaires trop longs et le non-paiement d'heures supplémentaires. Ses bénéfices pour le premier semestre de 2007 ont doublé par rapport à 2006 : 3 milliards de dollars. Il est aujourd'hui le premier groupe brésilien.
En 1997, la Vale été vendue par le gouvernement Cardoso à un consortium privé pour 1,5 milliard de dollars, alors que ses actifs (mines, usines, chemins de fer, ports et surtout gigantesques réserves de minerais) étaient estimés à plus de 40. Ce bradage s'est accompagné d'une illégalité : la banque Bradesco, chargée de fixer le prix de vente, faisait partie du groupe acheteur. La fraude est tellement voyante que le Parti des Travailleurs et la Centrale Unique des Travailleurs, tous deux soutiens du gouvernement Lula, ont formellement accepté le premier point de la consultation populaire qui remet en cause la privatisation. Après tout, à l'époque Lula lui-même dénonçait la vente réalisée par Cardoso, même s'il s'est bien gardé de revenir dessus une fois au pouvoir. En revanche, il n'est pas question pour le PT et la CUT d'accepter les trois autres points, qui visent l'actuelle politique de Lula.
Un sondage récent affirme que 50 % des Brésiliens seraient pour la renationalisation de la Vale, et seulement 28 % contre. La consultation réalisée ces jours-ci pourrait donc être un succès sur ce point. Et il faut souhaiter que ce ne soit que le début d'une mobilisation des travailleurs brésiliens pour la défense de leurs droits.